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30/09/2015

Raspail aussi

Notre civilisation est en train de disparaître

 

Entretien

Écrivain, Jean Raspail décrivait en 1973, dans son roman le Camp des saints, la submersion de l’Europe par la multitude des migrants du tiers-monde.

 

Que vous inspire la situation actuelle ?

Vous savez, je n’ai guère envie de me joindre à la grande ronde des intellectuels qui passent leur temps à débattre de l’immigration… J’ai l’impression que ces colloques ne servent à rien. Le peuple sait déjà toutes ces choses, intuitivement : que la France, telle que nos ancêtres l’ont façonnée depuis des siècles, est en train de disparaître. Et qu’on amuse la galerie en parlant sans cesse de l’immigration sans jamais dire la vérité finale. Une vérité d’ailleurs indicible, constatait mon ami Jean Cau, car celui qui la proclame est immédiatement poursuivi, condamné puis rejeté. Richard Millet s’en est approché, voyez ce qui lui est arrivé !

On dissimule aux Français la gravité du problème ?

Oui. À commencer par les dirigeants politiques ! Publiquement, “tout va très bien, Madame la marquise”. Mais, la porte fermée, ils reconnaissent que “oui, vous avez raison : il y a un vrai problème”. J’ai sur ce sujet des lettres édifiantes de hauts responsables de gauche, de droite aussi, à qui j’avais envoyé le Camp des saints. “Mais vous comprenez : on ne peut pas le dire…” Ces gens-là ont un double langage, une double conscience. Je ne sais pas comment ils font ! Je pense que le désarroi vient de là : le peuple sait qu’on lui cache les choses. Aujourd’hui, des dizaines de millions de gens ne partagent pas le discours officiel sur l’immigration. Ils ne croient aucunement que ce soit une chance pour la France. Parce que le réel s’impose à eux, quotidiennement. Toutes ces idées bouillonnent dans leur crâne et ne sortent pas.

Vous ne croyez pas possible d’assimiler les étrangers accueillis en France ?

Non. Le modèle d’intégration ne fonctionne plus. Même en admettant qu’on reconduise un peu plus de clandestins à la frontière et qu’on réussisse à intégrer un peu plus d’étrangers qu’aujourd’hui, leur nombre ne cessera pas de croître et cela ne changera rien au problème fondamental : l’envahissement progressif de la France et de l’Europe par un tiers-monde innombrable. Je ne suis pas prophète, mais on voit bien la fragilité de ces pays, où s’installe une pauvreté insupportable et sans cesse croissante à côté d’une richesse indécente. Ces gens-là ne se retournent pas vers leurs gouvernements pour protester, ils n’en attendent rien.

Ils se tournent vers nous et arrivent en Europe par bateaux, toujours plus nombreux, aujourd’hui à Lampedusa, ailleurs demain. Rien ne les en décourage. Et par le jeu de la démographie, dans les années 2050, il y aura autant de jeunes Français de souche que de jeunes étrangers en France.

Beaucoup seront naturalisés.

Ce qui ne signifie pas qu’ils seront devenus français. Je ne dis pas que ce sont de mauvaises gens, mais les “naturalisations de papier” ne sont pas des naturalisations de cœur. Je ne peux pas les considérer comme mes compatriotes. Il faudra durcir drastiquement la loi, en urgence.

Comment l’Europe peut-elle faire face à ces migrations ?

Il n’y a que deux solutions. Soit on essaie de s’en accommoder et la France — sa culture, sa civilisation — s’effacera sans même qu’on lui fasse des funérailles. C’est à mon avis ce qui va se passer. Soit on ne s’en accommode pas du tout — c’est-à-dire que l’on cesse de sacraliser l’Autre et que l’on redécouvre que le prochain, c’est d’abord celui qui est à côté de soi. Ce qui suppose que l’on s’assoit quelque temps sur ces « idées chrétiennes devenues folles », comme disait Chesterton, sur ces droits de l’homme dévoyés, et que l’on prenne les mesures d’éloignement collectif et sans appel indispensables pour éviter la dissolution du pays dans un métissage général. Je ne vois pas d’autre solution. J’ai beaucoup voyagé dans ma jeunesse. Tous les peuples sont passionnants mais, quand on les mélange trop, c’est bien davantage l’animosité qui se développe que la sympathie. Le métissage n’est jamais pacifique, c’est une utopie dangereuse. Voyez l’Afrique du Sud !

Au point où nous en sommes, les mesures que nous devrions prendre seraient forcément très coercitives. Je n’y crois pas et je ne vois personne qui ait le courage de les prendre. Il faudrait mettre son âme en balance, mais qui est prêt à ça ? Cela dit, je ne crois pas un instant que les partisans de l’immigration soient plus charitables que moi : il n’y en a probablement pas un seul qui ait l’intention de recevoir chez lui l’un de ces malheureux… Tout cela, c’est de la frime émotionnelle, un maelström irresponsable qui nous engloutira.

Il n'y a donc pas d'autre solution que la soumission ou la coercition ?

Il peut y en avoir une, mais qui n'aura qu'un temps: la constitution de communautés, d'isolats où trouverait refuge une population ethniquement et culturellement menacée par d'autres communautarismes. Du reste, cela commence déjà : on voit bien que les Français de souche fuient les quartiers dits sensibles. Les manifestations contre le mariage homosexuel sont aussi une forme de communautarisme : elles témoignent du refus par des millions de Français du "changement de civilisation" promis par la gauche et par Christiane Taubira. Aujourd'hui, tout le monde condamne le communautarisme, mais ce peut être une solution, au moins temporaire. Ces communautarismes opposés se renforceront mutuellement par l'animosité qu'ils se porteront et cela débouchera, à terme, sur des affrontements très sévères. Même s'il ne faut pas souhaiter qu'un malheur arrive.

Vous ne croyez pas à un sursaut, comme on en a vu souvent dans l'histoire de France ?

Non. Il fallait un esprit épique, le goût des destins élevés pour rendre possible un sursaut national. Il faudrait que des gens croient encore en leur pays, je n'en vois plus beaucoup. À moins de réformer de fond en comble l'Éducation nationale et les médias audiovisuels en privant de tribune les enseignants et les journalistes qui participent à la désinformation... On a désacralisé l'idée de nation, l'exercice du pouvoir, le passé du pays. On a fendillé la statue de la France, on l'a défigurée (surtout la gauche!) au point que plus rien n'inspire le respect. La puissance des idées fausses que diffusent l'Éducation nationale et les médias est incommensurable. Mais moi, je vis en France depuis 1 500 ans, j'y suis bien, avec les miens, et je n'ai pas envie que cela change...

Propos recueillis par Fabrice Madouas et Pauline Quillon 

Source : Valeurs Actuelles 23 octobre 2013

 

Champ d'étoiles (9)

Dimanche 21 juillet 2002

7me étape – De Taller à Dax – Environ 20 km

J'ai effectivement passé une très mauvaise nuit, le rembourrage de mon matelas de fortune ne pas isolé suffisamment de la dureté du sol. Malgré la fatigue je n'ai pas dû dormir plus de 2 heures. À 4h je n'y tiens plus, je range mes affaires et je décide d'aller attendre le lever du jour à l'extérieur. Je suis courbatu et affreusement fatigué. Assis à la limite du village endormi, je grignote quelques biscuits. La luminosité enfin devenue suffisante, je pars.

À mi-parcourt, je tombe de sommeil et je cherche un endroit pour faire une sieste. Ce n'est pas si simple. Autour de moi la forêt n'offre que des sous-bois couverts de fougères et de buissons peu engageants. Les pistes qui partent de la route doivent être emprunter par des véhicules et je n'ai pas envie de m'y coucher pour ne pas me faire rouler sur le ventre pendant mon sommeil. Enfin je trouve une petite clairière un peu à l'écart, j'y étale ma couverture de survie sur laquelle je m'allonge et je m'endors immédiatement. À mon réveil je me sens beaucoup mieux.

J'arrive dans l’agglomération dacquoise mais il faut traversé Saint-Paul-lès-Dax. J'ai faim et je m'arrête au McDo où je fais un copieux repas. Je prends mon temps car je n'ai pas envie d'arriver pendant le déjeuner de mes hôtes. D'ailleurs une fois au niveau de leur immeuble je continu ma route pour faire un tour en ville et revenir quand l’après-midi sera bien avancé. On m'appelle, je lève les yeux, c'est M. D*** qui guettait depuis sa fenêtre et qui m'a aperçu. Ils m'ont attendu pour manger et je n'ose pas leur dire que je me suis déjà gavé. Je mange donc le copieux repas régionale qu'ils m'ont préparé : salade landaise, magret de canard, Pastis landais... C'est succulent et j'arrive à finir (sauf le morceau de foie gras) à mon grand étonnement. Nous passons l'après-midi à visiter Dax, Mme D*** évoquant ses souvenirs de jeunesse. Repas du soir plus léger et coucher à 22h30. Dax ? Bof ! Mais les D*** m'ont tellement bien accueilli : j'ai été nourri, logé et mon linge a été lavé et repassé !

29/09/2015

Bribes d'Occident (31)

ROMA d'Olivier Astrologo

 

Champ d'étoiles (8)

Samedi 20 juillet 2002

6me étape – D'Onesse-Laharie à Taller – Environ 23 km

Un fois la brume matinale dissipée, ciel bleu qui se pare d'un voile orageux dans l'après-midi.

Hier, la propriétaire de l'hôtel m'a demandé la raison de mon pèlerinage et tous les motifs que je donnais d'habitude m'ont paru inexacts. Comme je lui est répondu que je ne savais pas, elle m'a dit que je le saurai en arrivant à Saint-Jacques.

Parti en forme très tôt dans la matinée. À peine sorti du village la forêt se referme sur moi et la fraîcheur aidant je ressens un moment de bonheur presque euphorique. Bien que je ne sente pas encore le poids du sac sur mes épaules j'aimerai ne rien porter et m'en aller les mains dans les poches, léger. Pourtant ce que j'ai dans le sac ce ne sont pas seulement des provisions, des vêtements de rechange et mon nécessaire de toilette c'est aussi mon statut d'être humain, le tribut à payer pour en être un. Sans ce fardeau je n'aurai bientôt plus grand chose d'humain ; je ne sais pas faire ma toilette en me léchant ni pêcher ou chasser à mains nues. La nature nous a pleinement et définitivement expulsé de son sein. Toute communion même sincère avec la nature ne peut être que ponctuelle et superficielle. Je n'apprécie ce chemin dans les bois seulement parce que je l'emprunte avec de bonnes chaussures et avec un sac qui ne me fait pas trop mal aux épaules, Tous produits issus de la technologie humaine. Mais peu importe, je me sens bien, heureux même. Je me dis qu'en même temps, les seuls dangers réels qui me menacent sur le Chemin viennent aussi paradoxalement des hommes. Je peux être renversé par une voiture ou mordu par un chien qui aurait passé sa clôture mais je ne vois pas picoré à mort par une corneille ou chargé par un chevreuil enragé. Un instant plus tard un moucheron vient m'agacer, mon pied se remet à me tourmenter et le charme est brisé.

En traversant Lespéron je visite l'église restaurée avec le mauvais goût du XIXe mais le clocher donjon est impressionnant de l'extérieur. La supérette ne prend pas la carte bancaire et son propriétaire en est tout ennuyé. Et moi je n'ai toujours pas de provisions.

Un couple de cyclistes d'une soixantaine d'années arrivant face à moi s'arrête, ils ont l'équipement et la coquille des pèlerins. La femme me demande avec un fort accent que je crois germanique si je vais à Santiago. Je confirme et une courte discussion s'engage. Ils en reviennent et me disent que l'aventure vaut vraiment le coup. Ils sont partis de Chartres le 1er juin et ont pris leur temps. Nous nous souhaitons bonne route. Hier, j'en ai rencontré deux autres avec à peu près le même profil en arrivant à Onesse mais trop fatigué je n'ai pas engagé la conversation et ils ont continué leur route.

Arrivé à Taller, j'entre dans l'unique bar-épicerie dans lequel le maire aurait dû me laisser la clé. Rien. Un vieux monsieur appelle le maire et me donne la réponse : la secrétaire a oublié de lui faire la commission. Il va venir mais ne donne pas d'heure. Je patiente 1h30 à une table en sirotant un Coca, en faisant quelques menus achats pour survivre jusqu'à Dax et en lisant le moindre article du Sud-Ouest puis je vais attendre dans le parc ombragé par de beaux tilleuls de la Mairie-Poste-local pour pèlerins. Décidément les bâtiments à Taller ont tous plusieurs fonctions, même le clocher de l'église est fortifiée en donjon. Je complète mon journal sous les frondaisons mais toujours pas de maire. J'en profite pour appeler Mme D*** pour la prévenir de mon arrivée demain. Elle se propose de venir me chercher. C'est très gentil et je la remercie mais je refuse. En suivant, j'appelle Manu pour lui raconter un peu.

Je vais boire une bière en terrasse. Les clients commencent à arriver, beaucoup de personnes d'un certain âge qui parlent chasse et Tour de France en attendant la belote. Le maire arrive enfin, cela doit faire 4 heures que je l'attends. Il doit avoir plus de 60 ans et s'expriment par phrases courtes qui tiennent du borborygme. Il m'amène visiter le local qui jouxte la mairie mais avant il tient a tamponner ma crédentiale. J'ai déjà le sceau du bar-épicerie mais je sens que mon refus le vexerait. Après tout, il s'est dérangé un samedi pour moi. Ensuite, visite du local qui ressemble plutôt a un squat sordide. Il me dit que l'appartement va bientôt être refait pour être loué. Le pèlerin qui m'y a précédé a laissé ses détritus et après on s'étonne que les municipalités rechignent à mettre des locaux à disposition. Il me propose de dormir à l'étage parce qu'il y a de la moquette. En fait, elle est sale, sent la poussière et la moisissure. Je le remercie et une fois qu'il est parti je choisis la cuisine carrelée au rez-de-chaussée. Un coup de balai emprunté au bar et couverture de survie plus sac de couchage rembourré avec mes rechanges égale matelas. Je dormirai habillé, mal sans doute mais demain l'étape est plutôt courte et au bout il y a Dax et la civilisation. De retour au bar je demande ce que je peux avoir pour les 1€20 qui me restent en poche. Le patron qui semble en fin de journée avoir un peu abusé de son whisky me demande de choisir, c'est offert. Peu après la conversation s'engage avec un client très intéressé par le Chemin et qui m'offre un verre à son tour ainsi qu'une petite plaquette qui balise le chemin. Il est tard et je vais me coucher. À Taller la population n'a pas le même sens de la générosité que la municipalité.

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La Mairie-Poste–local pèlerin

 

28/09/2015

Champ d'étoiles (7)

Vendredi 19 juillet 2002

5me étape - De Labouheyre à Onesse-Laharie – Environ 24 km

Parti de bon matin de l'hôtel endormi. La propriétaire passe la tête par la fenêtre et me souhaite bonne route. Ciel bleu et température déjà chaude, heureusement il y a un peu de vent. Le Chemin suit la N10 sur une partie de l'étape. Pendant un arrêt à l'écart de la route, alors que je suis assis à lire mon guide, je perçois quelque chose s'approchant de moi à la limite de mon champ de vision. Je lève la tête et découvre que c'est un écureuil qui a quitté la lisière de la forêt et n'est plus qu'à 1,50 m de moi. Mon mouvement le fait s'enfuir. Si je n'avais pas bougé jusqu'où se serait-il approché ? C'est curieux, nous ne sommes pourtant pas dans un parc où une certaine confiance peut s'établir entre les écureuils et les hommes.

J'ai aussi vu un chevreuil qui s'est laissé admirer un long moment, puis il est venu dans ma direction pour traverser la route. Le clic de mon appareil photo l'a effrayé, je le regrette. C'était près d'un lieu-dit aux nombreux airials dont les maisons typiques ont été restaurées avec soin. Un très bel endroit.

À mi-parcours, pique-nique rapide sous les pins. Arrivé à Onesse, la mairie m'annonce qu'il n'y a pas de local pour les pèlerins mais m'indique un hôtel. Les propriétaires sont des gens charmants mais ne prennent pas la carte bancaire et je n'ai pas suffisamment d'espèces. De plus le village n'a pas de distributeur, le seul disponible est à plusieurs kilomètres. Ça m'apprendra à ne pas être prévoyant ! La propriétaire trouve une solution : elle va faire des achats dans un commerce qui accepte la carte que je paierai à concurrence du montant que je lui dois. Elle me dit aussi que j'ai beaucoup de chance de trouver une chambre libre et se propose d'appeler la mairie de Taller pour réserver le local. C'est vraiment une personne très serviable. Au moment de prendre une douche, je constate une deuxième bêtise, j'ai oublié mon shampooing à Labouheyre.

Il est encore tôt et j'ai le temps de flâner dans le tout petit bourg, de boire un verre et de regarder vivre un village aux bâtiments administratifs datés sur les façades, et aux panneaux d'une autre époque (« Ralentissez nombreux enfants » sous le panneaux "Attention école"). Physiquement ça va à peu près même si la plante de mon pied droit me fait légèrement souffrir, et j'ai aussi les épaules en marmelade mais aucune ampoule.

Vive le troc ! Pour régler l'hôtel, je vais en fin de compte acheter des cigarettes. Je dors à l'hôtel grâce au vice de sa propriétaire...

Comme je m'ennuyais un peu j'ai voulu téléphoner, mais une fois dans la cabine je me suis rendu compte que je n'avais pas envie de parler à quiconque, pas encore. Ce soir je planifie le reste de mon voyage et je constate que le budget prévu est sérieusement entamé. J'espère au moins atteindre les Pyrénées.

Hier, j'ai lu dans un ancien numéro du Sud-Ouest que la voie de Tours venait juste d'être balisée de Moustey à Sorde-l'Abbaye. Je l'ai suivi sur une partie du parcours, un balisage à l'aide de plaquettes plastiques bleu et jaune et de peinture jaune. Il m'a servit à un moment où j'hésitais et puis il m'a soutenu le moral : c'est bon de savoir que l'on pensait aux pèlerins dont je fais partie. Dans l'article le Président de l’Association des Amis de Saint-Jacques de Compostelle d'Aquitaine souhaitait qu'il y ait un refuge tout les 15 ou 20 km comme sur la voie de Vézelay. C'est encore loin d'être le cas.

Comme beaucoup de pèlerins apprentis poètes j'ai moi aussi composé une petite chanson de marche même si elle ne rime pas :

« Pour avancer sur le Chemin ce n'est pas compliqué

Si tu en as envie : marche

Si tu n'en as pas envie : marche quand même

Si tu es en forme : marche

Si tu es fatigué : marche quand même

Si tu n'as mal nulle part : marche

Si tu as mal partout : marche quand même

Pour avancer sur le Chemin, tu vois, ce n'est vraiment pas compliqué. »

Après un repas landais trop copieux que je n'ai pas réussi à finir malgré mes efforts pour ne pas vexer - « Elle en fait toujours trop » m'a dit le patron en secouant la tête - soirée sympa à regarder les infos et à parler du Tour de France seul avec lui dans le minuscule salon de l'hôtel.

Il fait très très chaud ! Il faut pourtant aller dormir.

 

Histoire... (126)

C'est un peu long mais je crois que cela mérite d'être lu :

Pour le 300ème anniversaire de sa mort ne méprisons ni ses œuvres ni ses jardins…

 

Tout ne fût pas parfait sous le règne de Louis XIV mais nous lui devons la France plus que des petites histoires. Marie-Françoise Ousset Guide-Conférencière de la Ville de Paris lui écrit avec passion pour « dire davantage en somme » que les banalités vulgaires de la télévision de service public ! Une lettre d’amour sûrement mais aussi d’espoir pour la France…

Cher Louis XIV,

Peut-être avez-vous été un peu contrarié de la manière dont la télévision a parlé de vous en ce premier septembre 2015. Bien sûr il y eut de magnifiques photos de Versailles mais, comme vous avez pu le constater, « la 2 » vous a fait passer une fois de plus pour un despote à la fois léger et cruel et s’est complu a évoqué l’homosexualité de votre frère, vos maîtresses, la licence des mœurs à la cour, les dragonnades, votre fistule mal placée, la gangrène de votre jambe. Elle a même déclaré péremptoirement que aviez inventé la perruque car vous étiez chauve (ce qui est complètement faux : votre père en portait déjà une et lança la mode en 1620 !). Comme cadeau d’anniversaire, c’était plutôt raté !

Ce n’est tout de même pas pour votre fistule que l’Europe entière a eu les yeux tournés vers vous, que l’empereur de Chine Kangxi essaya de vous ressembler en portant une perruque comme la vôtre, que votre siècle fut appelé « le Grand Siècle », qu’il fut même appelé « le siècle des saints » (il faut dire que St Vincent de Paul vous avait précédé !). Et si les ambassadeurs du Siam se sont prosternés devant vous, ce ne fût tout de même pas pour voir de plus près votre pied gangréné ! Votre règne avait été le plus brillant du monde ! 3 rois seulement en Europe ont été qualifiés de « Grand » : vous, Louis de Bourbon mort en 1342 et Louis 1er de Hongrie. Vous aviez reconstitué la France et, lorsqu’on annonça votre mort à la cour de Frédéric 1er, roi de Prusse il fut seulement dit : « Le roi est mort ». Tout le monde comprit qu’il s’agissait de vous et pas d’un autre roi. Vous les aviez tous éclipsés.

Pour vous consoler un peu, cher Louis XIV, permettez-moi donc de vous dire que beaucoup en France ont appris à vous aimer grâce à de nouveaux et très bons historiens.

Certes, vous avez un peu trop vite déclaré la révocation de l’Edit de Nantes, fait démolir les murs de Port-Royal des Champs mais nous savons que l’homme dur du régime fut Louvois. Les dragonnades c’est lui et lorsque vous avez appris les horreurs qu’il avait commises, vous avez devant lui jeté votre canne par la fenêtre en lui disant : « Autrement, je vous la cassais sur le dos » Il est vrai pourtant que les exactions ont continué. Mais on n’oublie de dire dans nos médias que le midi avait été mis à feu et à sang de 1621 à 1629 par les protestants. (F. Bluche).

Au lieu de donner une fois de plus la parole à ce Michel de Decker, toujours frétillant de joie lorsqu’il s’agit de raconter les petites bassesses des grands ; au lieu de couper trop vite la parole à l’excellent historien Jean-Christian Petitfils, la TV aurait pu rappeler que vous avez mis fin à 40 années de trouble ; vous avez laissé la France plus prospère, plus peuplée, mieux armée qu’elle ne l’était au début de votre règne. Vous avez aidé Vauban à construire, autour de la France, ce qu’il a appelé sa « ceinture de fer ».Vous avez reconstituée une force navale : de 9 vaisseaux de ligne en 1660, il y en eût 220 en 1680 dépassant ainsi de 45 unités la Royal Navy (Bluche). La France a pu ainsi mieux se protéger contre « les incursions continuelles des algériens sur les côtes du Languedoc et de la Provence… » car « il n’y avait personne qui n’eut à pleurer un parent massacré, un ami esclave ou une famille ruinée » (Cal Maury).

Vous avez acheté Dunkerque à l’Angleterre, vous vous êtes emparé facilement de Lille. Vous avez tenu tête à une quadruple alliance contre la France : Espagne, Autriche, Angleterre, Pays-Bas. Bien loin de parader au château de Versailles, vous fûtes un homme de terrain, inspectant les remparts, les bastions, inaugurant des canaux surveillant les travaux.

Pour cet anniversaire, la télé aurait pu citer la lettre que le nonce apostolique écrivit à Rome dès votre décès : « (Louis XIV) avait le talent de gagner le cœur de tous ceux qui avaient l’honneur de l’approcher…grande rapidité pour débrouiller les affaires les plus compliquées… il a fait fleurir l’ordre d’un bon gouvernement et étendu les sciences et les arts à travers tout le royaume ». Bien sûr, certains diront : c’est un prêtre et un ambassadeur, il se doit d’être indulgent et élogieux. Mais pourquoi alors n’a-t-on pas cité le très anticlérical Voltaire qui, dans son « Siècle de Louis XIV », reconnait que les amusements de la cour « étaient de perfectionner le goût, la politesse et… de faire des français la nation la plus policée du monde ». Ce Voltaire qui contribua beaucoup à la Révolution Française, écrit également : « Louis XIV (…) fit voir qu’un roi absolu qui veut le bien, vient à bout de tout sans peine. Il n’avait qu’à commander, et les succès dans l’administration étaient aussi rapides que l’avaient été ses conquêtes. C’était une chose véritablement admirable de voir les ports de mer, auparavant déserts, ruinés, maintenant entourés d’ouvrages qui faisaient leur ornement et leur défense, couverts de navires et de matelots… de nouvelles colonies, protégées par son pavillon, partaient de tous côtés pour l’Amérique ».

À ce propos bien peu savent que le mot « Louisiane » vient de Louis XIV et que le fleuve Mississippi s’appelait à l’époque « le fleuve Colbert ». Mais si vous avez eu, cher Louis XIV, des comptoirs, jamais vous n’avez voulu la mondialisation. Lorsqu’on vous a proposé être roi dans les Balkans, vous avez refusé (F. Bluche).

La TV aurait pu citer aussi le Mal de Berwick parlant de vous : « Il était l’homme de son royaume le plus poli … depuis la monarchie vous ne trouverez roi plus humain » « Il n’avait de fier en lui que l’apparence… dès qu’on voulait lui parler, son visage se radoucissait et il avait l’art de vous mettre à l’instant en pleine liberté avec lui. »

La TV aurait pu tout simplement vous donner la parole, citer les sages recommandations que vous avez écrites à votre petit fils, le roi d’Espagne. Citer aussi vos mémoires dans lesquelles vous expliquez que, si vous avez pris le soleil pour emblème, c’est par « le bien qu’il fait en tout lieu prodiguant sans cesse de tous côtés la vie, la joie et l’action » ou encore : « C’est par le travail qu’on règne. Il y a de l’ingratitude et de l’audace à l’égard de Dieu, de l’injustice et de la tyrannie à l’égard des hommes de vouloir l’un sans l’autre » ;

Certes, l’émission a montré que vous étiez un excellent danseur mais on aurait pu rappeler aussi que, sous votre règne, Pierre Beauchamp a eu l’idée de codifier les pas de danse et que, lorsqu’il s’agit de danse classique, encore de nos jours, on emploie des mots français dans le monde entier. On dit « échappée battues » ou « sauts de chat » à New-York comme à Pékin.

Il ne fallait pas, bien sûr, s’attendre à ce que «  la 2 » ait le courage de dire ce que Philippe Erlanger (haut-fonctionnaire et écrivain) a calculé, à savoir qu’en comptant les deux Trianons, sur un demi-siècle, Versailles n’a pas coûté plus cher qu’un porte-avion moderne, qu’il a coûté le prix du déficit de l’exposition universelle de Léon Blum en 1936 ou encore à peu près le prix d’une campagne électorale d’un Président de la République ! Cela aurait été pourtant amusant !

Heureusement, les images parlent mieux que les mots et les contredisent parfois. On a pu se demander, pendant cette émission, pourquoi un roi aussi despotique que vous, qui avait été entouré parfois à Versailles de 36.000 ouvriers (F. Bluche), avait voulu un château sans douve, sans protection avec, au rez-de-chaussée, uniquement des portes-fenêtres. Comment dit-on portes-fenêtres en anglais ? French windows.

On a pu se demander pourquoi un obsédé sexuel avait fait réaliser un jardin qui parle avant tout à l’intelligence jamais aux sens : pas de banquettes pour s’allonger, presque pas de bancs pour s’asseoir, pas de coins d’ombre, pas de salon de verdure pour se mettre à l’abri des regards indiscrets. On s’est demandé surtout comment « la 2 » avait pu dire que la ménagerie de Versailles ressemblait à un phallus alors que les gravures nous la montre octogonale entourée de cours en éventail pour les différents animaux.

Pour les jeunes qui n’aiment pas la France car ils ne la connaissent pas, on aurait pu montrer vos côtés anti-conformistes. Cela aurait changé un peu ! Leur dire, par exemple que vous fûtes toujours plus passionné par votre jardin que par l’intérieur de votre château. Que, voulant tout comprendre par vous-même, on vous a vu prendre les cisailles du jardinier pour couper des ifs à Versailles, que votre meilleur ami a sans doute été le jardinier André Le Nôtre. Vous le convoquiez tous les matins. Il osait vous embrasser et lorsqu’il fut très âgé, vous l’avez vous-même promené dans sa chaise roulante.

Pourquoi ne parle-t-on jamais de votre amour des enfants ? S’il y a autant de « marmousets » dans le parc de Versailles, c’est sur vos recommandations. Vous aviez peur qu’on y mette toujours plus de statues grecques. Nous avons conservé votre lettre disant « je veux de l’enfance répandue partout » et, à l’intérieur du château, c’est vous qui avez demandé, pour le « salon de l’œil de bœuf », une frise représentant des enfants. C’est d’ailleurs en allant voir les vôtres que vous avez fait la connaissance de Mme de Maintenon. Vous l’avez épousée à l’âge de 45 ans et vous lui êtes resté fidèle jusqu’à votre mort à 77 ans. Elle était pieuse, bigote dit-on à l’encan, mais vous n’avez pas eu peur d’épouser une femme qui était née à la prison de Niort car son père criblé de dettes y était emprisonné ; une femme qui eut une jeunesse misérable avant d’épouser le poète grabataire Scarron. Elle vous a peut-être dit que, pour gagner un peu d’argent, elle nourrissait en foin des chevaux et a même gardé des dindons …avant de garder les enfants que votre Majesté a eus de la Montespan ! (Cal Maury)

Si on avait voulu rétablir la vérité et sortir des poncifs on aurait pu dire tellement d’autres anecdotes amusantes qui vous auraient rendu plus familier à tous !

Vous avez été un grand roi peut-être parce que vous avez su écouter et regarder. Écouter car dès votre plus jeune âge, Mazarin tenait à vous faire participer au Conseil. Et vous avez écrit dans vos mémoires que vous étiez heureux lorsque vous constatiez que les ministres prenaient la décision que vous aviez choisie dans votre petite tête d’enfant. Vous aviez une oreille excellente, ce qui vous a permis de choisir pour la cour les meilleurs musiciens de votre royaume : Campra, Lully Delalande. Vous aviez également un regard extraordinaire, « insoutenable » même a-t-on pu dire qui vous a permis de reconnaître autant les grands génies de votre époque qu’une erreur sur un champ de bataille, un défaut dans une statue, une dissymétrie dans les fenêtres du Grand Trianon ou dans la hauteur d’un jet d’eau.

Cher Louis XIV, merci pour la beauté que vous avez donnée à la France dans tous les domaines. Merci de nous avoir rendus fiers de notre pays. Vous saviez, sans doute, qu’aucune civilisation ne se détruit du dehors sans s’être détruite de l’intérieur. Alors s’il vous plait, cher Louis XIV, là où vous êtes maintenant, au Paradis, faites-vous présenter un homme que vous apercevez sans doute au loin, dans le groupe des gens qui auraient donné leur vie pour sauver la France. Il a nom Jean Ousset. Vous devriez vous entendre avec lui. Dans votre brochure « Manière de montrer les jardins de Versailles », vous dites souvent : « il faut faire une pause pour considérer les fontaines, les bas-reliefs…les vases, les statues ». Vous employez pudiquement le terme « considérer » qui laisse entendre qu’il faut regarder attentivement et non pas vouloir admirer ou détester trop vite. Vous dites aussi très souvent dans cette brochure « on en fera le tour… on en fera le demi-tour ». Avec d’autres mots, Jean Ousset disait la même chose : « Il faut qu’une statue tourne, il faut tourner autour de l’œuvre d’art ».

Alors, avec lui, priez pour la France, dites à Jeanne d’Arc qu’elle vienne, d’une manière ou d’une autre, sauver la France une fois encore. Elle en meurt d’envie, elle, qui voulait tant continuer à se battre ! Son cœur est toujours ici, quelque part au fond de la Seine. Si Dieu n’a pas voulu qu’il brûle, vous pensez bien que ce n’est pas pour qu’il soit avalé par un poisson ou qu’il parte dans la Manche se rapprochant ainsi des côtes anglaises ! Son cœur est toujours chez nous, dans la Seine, c’est évident. Peut-être le retrouvera-t-on un jour.

Merci d’avance de tout ce que vous pourrez faire encore pour nous et veuillez agréer, cher Louis XIV, l’expression de ma respectueuse admiration.

Marie-Françoise OUSSET

Source : Ichtus

 

27/09/2015

Champ d'étoiles (6)

Petit aparté :

En me replongeant dans mes notes que je n'avais jamais relues bien des souvenirs oubliés me reviennent en mémoire. C'est rafraîchissant et un peu triste ce rappel du temps qui passe mais cela m'éloigne de la sinistre actualité. J'ai bien conscience que ces petites anecdotes plutôt banales écrites sans talent n'ont rien du roman d'aventure mais les rapporter ici me fait du bien. J'avoue même que je n'aurais pas cru y prendre autant de plaisir. Si parmi mes quelques fidèles visiteurs certains n'aiment pas qu'ils prennent leur mal en patience, il n'y a que 40 étapes...