10/04/2006
Cinq controverses
1. Plus il y a d’armes à feu chez les particuliers et plus la société est dangereuse, c’est pour cela que nos dirigeants promulguent des lois toujours plus restrictives et tatillonnes afin d’en réglementer la possession et le port. Mais les choses sont-elles vraiment aussi simples ?
2. Pour beaucoup de monde, cela ne fait aucun doute, Christian Ranucci, condamné à la peine capitale et exécuté en 1976 pour l’enlèvement et le meurtre d’une fillette, est innocent. Le livre de Gilles Perrault, Le pull-over rouge, et la campagne pour l’abolition de la peine de mort y sont pour beaucoup. Mais Gilles Perrault a-t-il mené une enquête sérieuse et honnête pour écrire son ouvrage ? Gérard Bouladou, dans L'affaire du pull-over rouge: Ranucci coupable! se livre à une contre-enquête et arrive à des conclusions totalement différentes.
3. L’île de Gorée au Sénégal est le symbole de la déportation des Africains avec son incontournable Maison des esclaves, dernière étape avant l’exil. Pourtant, voici ce qu’écrit Christian Rioux dans Le Devoir, un journal québécois, le 30 septembre 2000 :
Dakar - L'île de Gorée est l'un des endroits les plus mythiques d'Afrique. Une sorte de lieu de pèlerinage à la mémoire des millions d'esclaves qui ont traversé l'Atlantique pour venir travailler ou mourir en Amérique.
En prenant le petit bateau qui relie l'île au port grouillant de Dakar, on a tout le loisir d'imaginer le sort de ceux qu'on traînait enchaînés vers l'inconnu. Difficile de ne pas être émus par le souvenir de ceux qu'on entassait comme des bêtes à 300 par bateau. C'est la tête chargée d'images qu'on pose donc le pied sur l'îlot de 900 m de long.
Peuplée de quelques centaines d'habitants, l'île située à la pointe ouest de l'Afrique a d'abord été occupée par les Hollandais, puis par les Français. Pendant deux siècles, elle a vécu du commerce lucratif des esclaves.
Ces maisons coloniales perdues au milieu d'une mer turquoise sont devenues un véritable lieu de culte. On vient par milliers chaque année, «surtout des États-Unis et de France», pour se recueillir devant la «Porte du voyage sans retour», par où les esclaves se seraient embarqués les chaînes aux pieds.
L'endroit a inspiré de nombreux romans, dont le récent Black, les chaînes de Gorée, du Québécois Paul Ohl. Il faut dire que la Maison des esclaves est devenue «patrimoine de l'humanité» depuis que l'Unesco a classé l'ensemble de l'île. La Fondation Danielle Mitterrand a financé une partie de ses rénovations. Bill Clinton, Nelson Mandela, Jean Chrétien et même le pape sont venus s'y recueillir. Toutes les télévisions du monde lui ont consacré de longs reportages, y compris Radio-Canada pas plus tard que cet automne.
Sauf que, comme dans tous les lieux de pèlerinage, il devient de plus en plus difficile de distinguer le mythe de la réalité.
Selon Abdoulaye Camara, directeur de l'Ifan (Institut fondamental de l'Afrique noire), et Joseph de Benoist, un historien jésuite aujourd'hui décédé, la maison présentée comme une construction hollandaise a en fait été bâtie par les Français en 1783 pour une riche métisse (une «signare») nommée Anna Colas. Les pièces du bas ont peut-être servi de logement à des esclaves domestiques mais sûrement pas à la traite. Il s'agissait essentiellement d'entrepôts à marchandises. L'esclaverie, qui a disparu, se situait non loin du fort qui abrite aujourd'hui le Musée historique.
Le mythe de la Maison aux esclaves doit beaucoup à l'indéniable talent du conservateur Boubacar Joseph Ndiaye, qui a mis une douzaine d'années à forger une légende qui a aujourd'hui force de loi. Une pièce de la maison est d'ailleurs tapissée des citations de ce militant noir anti-esclavagiste. Des photos de lui, croquées à côté de quelques-unes des sommités de ce monde, sont accrochées un peu partout.
En dehors de toutes considérations historiques, le coloré personnage raconte sans sourciller qu'«entre 15 et 20 millions d'esclaves noirs sont partis de Gorée». Un colloque tenu en 1977 sur l'île a pourtant conclu qu'il était impossible d'arriver à une évaluation aussi extravagante. Le père Benoist estimait à environ 500 le nombre d'esclaves qui auraient séjourné dans l'île chaque année. Les mêmes spécialistes réunis à Gorée évaluaient entre 12 et 25 millions le nombre total d'Africains qui ont traversé l'Atlantique en 300 ans.
Il apparaît aujourd'hui évident que Gorée n'a jamais été le centre de traite que l'on présente aux touristes naïfs. Les riches créoles qui tenaient l'île n'ont obtenu le privilège du commerce négrier qu'en 1766. La traite semble avoir été limitée aux «esclaves de case», utilisés pour le travail domestique et intégrés dans les familles de l'île au lieu d'être vendus.
Loin du mythe soigneusement entretenu à des fins touristiques, Gorée aurait donc joué un rôle mineur par rapport aux comptoirs de la Côte des esclaves (au Bénin), du golfe de Guinée et de l'Angola. De même, la fameuse Porte du voyage sans retour, où s'est recueilli le pape devant les caméras du monde entier, n'aurait été qu'un vide-ordures. On se demande pourquoi les négriers auraient jeté l'ancre en pleine mer alors que Gorée, qui signifie «bonne rade», a un port abrité.
Vous comprendrez qu'en visitant la petite île mon sang n'ait fait qu'un tour en entendant le guide comparer allégrement le drame des esclaves de Gorée à celui des Juifs morts pendant l'Holocauste. Les médias africains n'ont pas encore la sensibilité de ceux du Québec ou du Canada anglais. Ils sont aussi très influencés par les thèses militantes afro-américaines sur le sujet.
Sinon, je crois bien que le Sénégal aurait eu droit à sa petite affaire Michaud. Cela se passe dans une société où l'on ne pèse pas encore, comme ici, chaque demi-mot sur le sujet, avec les qualités et les défauts que cela comporte.
En visitant l'île, certains m'ont dit que les chimères que l'on colporte sur ce lieu ne changent rien au drame de l'esclavage. C'est vrai, surtout lorsqu'on sait qu'il n'a été aboli en Mauritanie... qu'en 1980! Il en va pourtant du droit de dire la vérité sur les sujets les plus délicats, même lorsqu'ils ébranlent quelques mythes. Quant à la mémoire des esclaves de Gorée, elle n'a vraiment, mais vraiment pas besoin de ces exagérations fantaisistes pour nous émouvoir.
4. Le général Georges Amstrong Custer (1839-1876) était-il vraiment le chef incompétent et le massacreur d’indiens maint fois décrit ? Ce site laisse penser que le personnage réel était très éloigné de sa légende noire.
5. Il est couramment admis que le site de l’antique bataille d’Alésia se trouve à Alise-Sainte Reine. C’est pourtant loin d’être aussi certain, comme l’explique les partisans de sa localisation aux Chaux Des Crotenay. Pour ce faire une idée, la visite de l’excellent et très complet site de l’Institut Vitruve est recommandée.
19:14 | Lien permanent | Commentaires (3)
La débâcle
J'ai failli y croire. Je me suis dit que, nonobstant les lacunes de la loi sur le CPE et la manière dont elle avait été imposée, les couards malfaisants qui nous servent de dirigeants allaient au moins tenir face à la chienlit. Et puis Jacques Chirac a parlé, expliquant en bref que cette mesure était bonne mais qu'il déconseillait son application. On retrouvait notre Président dans toute sa splendeur. Puis l'union brinquebalante de la droite s'est lézardé pour exploser dans un sauve-qui-peut du plus belle effet avec traîtrises et coups fourrés à la clef. Et j'apprends maintenant que le CPE est mort et bientôt enterré. Nos dirigeants et la classe politique aura donc été minables comme d'habitude. C'est à vomir mais, comme toutes les choses qui redeviennent normales, confortable. Dommage qu'il n'y rien de plus débilitant que le confort.
19:09 | Lien permanent | Commentaires (3)
Le tour de France des monuments (choix absolument arbitraire) : Gironde
19:05 | Lien permanent | Commentaires (2)
09/04/2006
Revolver

The faithfull colt
11:10 | Lien permanent | Commentaires (0)
Utopie
Je suis persuadé que si l'on permettait aux êtres humains de vivre dans le monde tel qu'ils le rêvent, la quasi totalité s'en enfuirait très rapidement, épouvantée.
11:00 | Lien permanent | Commentaires (3)
Moomins
Hier, lors d'une discussion avec des amis, je me suis aperçu que j'étais le seul à connaître les Moomins. J'apprécie beaucoup ce dessin animé que je regardais il y a bien des années maintenant. C'est gentil sans être mièvre et captivant sans avoir à user de violence racoleuse, le tout non sans une certaine poésie. Je le recommande chaudement aux enfants (et aux parents).
Un site français (en construction)
Un site en anglais sur le phénomène Moomins en Finlande
09:58 | Lien permanent | Commentaires (0)
L'homme qui courait après sa chance
Il était une fois un homme malheureux. Il aurait bien aimé avoir dans sa maison une femme avenante et fidèle. Beaucoup étaient passées devant sa porte, mais aucune ne s'était arrêtée, Par contre, les corbeaux étaient tous pour son champ, les loups pour son troupeau et les renards pour son poulailler. S'il jouait, il perdait, S'il allait au bal, il pleuvait. Et si tombait une tuile du toit, c'était juste au moment où il était dessous. Bref, il n'avait pas de chance. Un jour, fatigué de souffrir des injustices du sort, il s'en fut demander conseil à un ermite qui vivait dans un bois derrière son village. En chemin, un vol de canards laissa tomber sur lui, du haut du ciel, des fientes, mais il n'y prit pas garde, il avait l'habitude. Quand il parvint enfin, tout crotté, tout puant, à la clairière où était sa cabane, le saint homme lui dit :
- Il n'y a d'espoir qu'en Dieu. Si tu n'as pas de chance, lui seul peut t'en donner. Va le voir de ma part, je suis sûr qu'il t'accordera ce qui te manque.
L'autre lui répondit :
- J'y vais. Salut l'ermite !
Il mit donc son chapeau sur la tête, son sac à l'épaule, la route sous ses pas, et s'en alla chercher sa chance auprès de Dieu, qui vivait en ce temps-là dans une grotte blanche, en haut d'une montagne au-dessus des nuages.
Or en chemin, comme il traversait une vaste forêt, un tigre lui apparut au détour du sentier. Il fut tant effrayé‚ qu'il tomba à genoux en claquant des dents et tremblant des mains.
- Épargne-moi, bête terrible, lui dit-il. Je suis un malchanceux, un homme qu'il vaut mieux ne pas trop fréquenter. En vérité, je ne suis pas comestible. Si tu me dévorais, probablement qu'un os de ma carcasse te trouerait le gosier.
- Bah, ne crains rien, lui répondit le tigre. Je n'ai pas d'appétit. Où vas-tu donc, bonhomme ?
- Je vais voir Dieu, là-haut, sur sa montagne.
- Porte-lui mon bonjour, dit le tigre en bâillant. Et demande-lui pourquoi je n'ai pas faim. Car si je continue à n'avoir goût de rien, je serai mort avant qu'il soit longtemps.
Le voyageur promit, bavarda un moment des affaires du monde avec la grosse bête et reprit son chemin.
Au soir de ce jour, parvenu dans une plaine verte, il alluma son feu sous un chêne maigre. Or, comme il s'endormait, il entendit bruisser le feuillage au-dessus de sa tête. Il cria :
- Qui est là ?
Une voix répondit :
- C'est moi, l'arbre. J'ai peine à respirer. Regarde mes frères sur cette plaine. Ils sont hauts, puissants, magnifiques. Moi seul suis tout chétif. Je ne sais pas pourquoi.
- Je vais visiter Dieu. Je lui demanderai un remède pour toi.
- Merci, voyageur, répondit l'arbre infirme.
L'homme au matin se remit en chemin. Vers midi il arriva en vue de la montagne. Au soir, à l’écart du sentier qui grimpait vers la cime, il vit une maison parmi les rochers. Elle était presque en ruine. Son toit était crevé, ses volets grinçaient au vent du crépuscule. Il s'approcha du seuil, et par la porte entrouverte il regarda dedans. Près de la cheminée une femme était assise, la tête basse. Elle pleurait. L'homme lui demanda un abri pour la nuit, puis il lui dit :
- Pourquoi êtes-vous si chagrine ?
La femme renifla, s'essuya les yeux.
- Dieu seul le sait répondit-elle.
- Si Dieu le sait, lui dit l'homme, n'ayez crainte, je l'interrogerai, Dormez bien, belle femme.
Elle haussa les épaules. Depuis un an la peine qu'elle avait la tenait éveillée tout au long de ses nuits.
Le lendemain, le voyageur parvint à la grotte de Dieu. Elle était ronde et déserte. Au milieu du plafond était un trou par où tombait la lumière du ciel. L'homme s'en vint dessous. Alors il entendit :
- Mon fils, que me veux-tu ?
- Seigneur, je veux ma chance.
- Pose-moi trois questions, mon fils, et tu l'auras. Elle t'attend déjà au pays d'où tu viens.
- Merci, Seigneur. Au pied du mont est une femme triste. Elle pleure. Pourquoi ?
- Elle est belle, elle est jeune, il lui faut un époux.
- Seigneur, sur mon chemin j'ai rencontré un arbre bien malade, De quoi souffre-t-il donc ?
- Un coffre d'or empêche ses racines d'aller chercher profond le terreau qu'il lui faut pour vivre.
- Seigneur, dans la forêt est un tigre bizarre. Il n'a plus d'appétit.
- Qu'il dévore l'homme le plus sot du monde, et la santé‚ lui reviendra.
- Seigneur, bien le bonjour !
L'homme redescendit, content, vers la vallée. Il vit la femme en larmes devant sa porte. Il lui fit un grand signe.
- Belle femme, dit-il, il te faut un mari !
Elle lui répondit :
- Entre donc, voyageur. Ta figure me plaît. Soyons heureux ensemble !
- Hé, je n'ai pas le temps, j'ai rendez-vous avec ma chance, elle m'attend, elle m'attend ! Il la salua d'un grand coup de chapeau tournoyant dans le ciel et s'en alla en riant et gambadant. Il arriva bientôt en vue de l'arbre maigre sur la plaine. Il lui cria, de loin :
- Un coffre rempli d'or fait souffrir tes racines. C'est Dieu qui me l'a dit !
L'arbre lui répondit :
- Homme, déterre-le. Tu seras riche et moi je serai délivré !
- Hé, je n'ai pas le temps, j'ai rendez-vous avec ma chance, elle m'attend, elle m'attend !
Il assura son sac à son épaule, entra dans la forêt avant la nuit tombée. Le tigre l'attendait au milieu du chemin.
- Bonne bête, voici : Tu dois manger un homme. Pas n'importe lequel, le plus sot qui soit au monde.
Le tigre demanda :
- Comment le reconnaître ?
- Je l'ignore, dit l'autre. Je ne peux faire mieux que de te répéter les paroles de Dieu, comme je l'ai fait pour la femme et pour l'arbre.
- La femme ?
- Oui, la femme. Elle pleurait sans cesse. Elle était jeune et belle. Il lui fallait un homme. Elle voulait de moi. Je n'avais pas le temps.
- Et l'arbre ? dit le tigre.
- Un trésor l'empêchait de vivre. Il voulait que je l'en délivre. Mais je t'ai déjà dit : je n'avais pas le temps. Je ne l'ai toujours pas. Adieu, je suis pressé.
- Où vas-tu donc ?
- Je retourne chez moi. J'ai rendez-vous avec ma chance. Elle m'attend, elle m'attend !
- Un instant, dit le tigre. Qu'est-ce qu'un voyageur qui court après sa chance et laisse au bord de son chemin une femme avenante et un trésor enfoui ?
- Facile, bonne bête, répondit l'autre étourdiment. C'est un sot. A bien y réfléchir, je ne vois pas comment on pourrait être un sot plus sot que ce sot-là.
Ce fut son dernier mot. Le tigre enfin dîna de fort bon appétit et rendit grâce à Dieu pour ses faveurs gratuites.
Henri GOUGAUD
08:23 | Lien permanent | Commentaires (5)