17/01/2007
Quelque chose dans l’air
À défaut d’être heureux, ils n’étaient pas malheureux. Qui en aurait douté ne serait-ce qu’un seul instant ?
La paix régnait depuis très longtemps et pour longtemps encore. Les quelques semblants de conflits armés qui perduraient, étaient non seulement endigués, mais en voie de résolution. De toute façon, hormis la population locale, personne ne s’en souciait vraiment et les bulletins d’information sur le sujet ne prenaient que quelques lignes dans les quotidiens.
L’économie et la santé allaient bien, si la non aisance existait encore de façon résiduelle, elle régressait chaque année. Inversement, la longévité humaine progressait de façon continue, le Ministre de la Santé n’avait-il pas triomphalement annoncé que l’espérance de vie avait encore augmenté de 3 mois l’année passée contre 2 l’année antérieure ?
L’art s‘épanouissait sous toutes ses formes, grâce aux subventions les artistes pouvaient développer leurs talents sans être distraits par les contingences matérielles. Sans cela comment imaginer par exemple que les poètes puissent avoir eu l’idée d’inventer la Cantate trisyllabique qui faisait actuellement fureur dans les salles de la Capitale. Certes, le commun n’appréciait pas encore cette forme de chant à sa juste valeur mais ce n’était qu’une question de temps. Car bien que l’école et les médias aient grandement amélioré son niveau culturel, il préférait pour l’instant encore les concours de Hurleurs Urbains. Ceux-ci bien sûr n’étaient pas non plus dénués de talent sur le plan créatif.
L’architecture n’était pas en reste et dans la banlieue nord de la Capitale la Tour de Paix s’élevait lentement mais sûrement vers le firmament. Symbole destiné à rappeler les réussites obtenus dans la quête du bonheur pour tous, elle était devenue une destination touristique fort courue et le tramway magnétique y déversait chaque jour son contingent de curieux. Quand elle serait terminée elle serait le plus haut monument de la planète.
Mais c’est peut-être dans le mode de gestion de l’état que la période avait atteint sa perfection. La démocratie ayant montré ses limites, la population ne comprenant pas toujours ce qui était bon pour elle, les organes dirigeants étaient maintenant doublés d’associations, de conseils et de groupes qui non seulement veillaient à la bonne gestion de l’Espace Territorial mais évitait aussi que les élus ne prennent une trop grande autonomie, ce qui serait immanquablement dommageable pour le peuple. Par exemple, le Conseil du Compromis composé de 21 sages renouvelables par tiers et par cooptation tous les 2 ans était chargé de donner un avis sur le bien fondé des nouvelles lois, de façon à ne léser aucune minorité. Ou le Conseil de la Mémoire Intacte désigné à vie par un collège d’historiens, qui avait pour mission de superviser le contenu de toute parution afin d’épargner au public les théories non conformes et malsaines de certains auteurs. Car malgré toute la bonne volonté des dirigeants il y aura toujours des esprits pervers prêts à profiter d’un relâchement. L’Espace Territoriale était ainsi pris dans un subtil réseau de compétences qui se compénétraient et évitait tout abus de quiconque ainsi que la pérennité du système.
Pourtant, il existait des individus qui n’étaient pas satisfaits des bienfaits des temps présents, des idéologues chagrins qui voyaient des signes de décadence et des symptômes annonçant des bouleversements partout, des réactionnaires nostalgiques qui en appelaient à un sursaut du peuple. Mais un sursaut pourquoi ? Ce n’étaient que les délires de personnes aigris à la vue du succès de théories contraires aux leurs, les imprécations d’insatisfaits pathologiques qui demandaient des libertés là où elles n’avaient aucunes raisons rationnelles d’exister, les perfidies d’alarmistes qui voyaient le mal arrivait au pas de course. Les instances du Pouvoir, magnanimes, n’entamaient des poursuites contre eux seulement quand ils dépassaient certaines limites.
Les événements débutèrent en avril. Les printemps sont souvent cruels. Les Autres arrivèrent sans que quiconque ne s’en aperçut. En fait, ils avaient toujours étaient là. Comme personne ne savait les reconnaître, les Forces de l’Ordre ne surent pas où et contre qui intervenir. Le Pouvoir empêtré dans les subtilités de son fonctionnement fut incapable de réagir à temps, et même de réagir tout simplement. Et tout s’écroula. Dans un premier temps, les citoyens ne purent ni ne voulurent y croire. Puis, quand ils finirent par se rendre à l’évidence ils se lamentèrent en se demandant ce qu’ils avaient bien pu faire pour en arriver là, comment cela avait-il été possible, pourquoi la puissance et la richesse de l’état n’avait été d’aucune utilité, pour quelle raison les institutions qui semblaient penser à tout n’avait pas vu arriver la catastrophe. Certains, hébétés, répétaient inlassablement que les choses ne pouvaient pas s’arrêter ainsi puisque tant de projets restaient à réaliser. Et tous furent balayés, les riches, ceux qui l’étaient moins, les jeunes, les moins jeunes, les puissants, les gens ordinaires, les poètes Trisyllabiques, les Hurleurs Urbains, la Présidence, le Gouvernement, le Conseil du Compromis, celui de la Mémoire Intacte, les villes, les monuments, les infrastructures, la Tour de la Paix... Balayés.
18:35 | Lien permanent | Commentaires (8)
Le tour de France des monuments (choix absolument arbitraire) : Volvic (63)
18:30 | Lien permanent | Commentaires (0)
13/01/2007
Profil
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Henri de Toulouse Lautrec
Jeune fille aux cheveux roux19:06 | Lien permanent | Commentaires (4)
Pilori
Lu sur le 20 minutes du 11 janvier 2007 :
"Un militant du FN, suspect du meurtre du pilote de quad, a été mis en examen
Un homme de 34 ans a été arrêté mercredi matin et a reconnu être l'auteur du coup de feu qui a tué Karim Zaiter, un pilote de quad, la veille de Noël dans un square du quartier Beaubreuil de Limoges.
Membre du FN
Le suspect, un agent de sécurité habitant au neuvième étage d'un immeuble de ce quartier, a dit aux enquêteurs avoir tiré au hasard sur un des engins qui tournaient sur le square sans vouloir tuer, car il était «excédé par le bruit». L’homme, membre du Front national, a également assuré aux enquêteurs ne pas connaître la victime et ignorer qu'elle était d'origine maghrébine.
Connu des services de police pour des violences, le suspect, un tireur sportif, possédait légalement plusieurs armes de différents calibres retrouvées à son domicile par les enquêteurs. Il appartient maintenant de déterminer si l’une d’elles a servi à tirer sur le jeune pilote.
«Ce n'est pas comme les Experts»
La résolution de l’enquête, très rapide, pour ce genre de «crime-énigme», a mobilisé près de 50 enquêteurs venant de Limoges bien sûr, mais aussi de Paris, d’Orléans, Tours et Poitiers. A affaire exceptionnelle, «moyens exceptionnels», explique une source proche de l’enquête. «Personne du quartier ne nous a aidé, il a fallu qu’on se débrouille seul».
L'autopsie avait permis d'établir qu'il avait été tué par une arme de calibre 22 long rifle et que la trajectoire de la balle était verticale démontrant que l'auteur se trouvait dans une tour de la cité. Mais avec près de 400 appartements d’où avait pu être tirée la balle mortelle, l’élucidation du crime tient de la «performance». «Ce n’est pas comme dans les Experts», plaide-t-on.
La piste des détentions d'armes
Surtout que les enquêteurs ont dû compter avec les habitants du quartier dont une partie est «hostile par nature à la police» et une autre, excédée par le bruit provoqué par les rodéos de quads. Qui trouvait que ce qui était arrivé au jeune homme tué, c’était «finalement bien fait».
Sans renseignements sûrs fournis par des voisins, les enquêteurs ont suivi la piste des détentions d’armes pour finalement arrêter ce suspect, mercredi matin vers 6 h. L’homme, père de deux enfants, a été mis en examen pour assassinat, puis incarcéré.
Johan Hufnagel"
Personnellement, je propose que l'on n'enferme pas ce criminel, non par indulgence ni une quelconque sympathie pour ce genre d'individu mais pour l'édification des foules. Je m'explique : un membre du FN, violent, connu de la police, détendeur d'armes à feu, agent de sécurité qui tue un homme prénommé Karim parce qu'il est excédé par le bruit c'est beau comme un article de Libération. Bien sûr les années ont passé et il ne peut pas être ancien de l'Indo ou de l'Algérie de même que l'on ignore s'il battait sa femme et ses enfants mais il ne faut pas être trop exigent. Donc je propose qu'on ne l'enferme pas mais qu'on le balade de place en place dans les grandes villes et les petits villages avec un écriteau autour du cou racontant sa terrifiante histoire et cela jusqu'aux élections présidentielles.
Au fait, je ne me souviens plus avoir vu indiquée dans les médias l'appartenance politique des criminels et des délinquants quand ils n'appartiennent pas au FN (et encore moins dans le titre d'un l'article). Donc ou il n'y a que les membres du FN qui ne respectent pas la loi ou les journalistes ont des oublis suspects.
18:45 | Lien permanent | Commentaires (9)
Cinq choses peu connues à mon sujet
Bon, disons-le tout de suite, je ne suis pas très amateur (euphémisme) de questionnaire. Aussi quand Ibis m'a aimablement sous-entendu qu'il aimerait que j'y réponde à mon tour, j'ai pensé que peut-être avec le temps il oublierait (je sais, je suis un couard). Mais en visitant le blog d'Ornithorynque j'ai découvert avec horreur qu'il a lui aussi pensé à moi. Certes, je devrais me sentir flatté que deux blogueurs pensent à moi, mais j'ai surtout compris que je ne pouvais plus me défiler. Donc acte.
1- Santé. Je souffre d'une maladie chronique, la névralgie d'Arnold. Ce n'est pas mortel mais les crises sont très douloureuses.
2- Lâcheté. La seule fois qu'on m'a demandé en mariage je n'ai rien su répondre. Heureusement que c'était au restaurant et que nous étions en train de choisir les plats, de la sorte j'ai pu rester caché derrière la carte jusqu'à ce que ce qu'on parle d'autre chose.
3- Insolite. Sur le Chemin de Saint Jacques de Compostelle, j'ai vu écrit à la bombe "Bon anniversaire" suivit de mon prénom. Il faut savoir que j'étais en Espagne, que c'était écrit en français, et surtout que c'était le lendemain de mon anniversaire, ce dont je n'avais parlé à aucun compagnon de route.
4- Principe. Je n'ai jamais fumé de cannabis, ne serait-ce qu'une bouffée.
5- Génétique. Ma grand-mère maternelle était sino-vietnamienne. Certains me disent cela ne se voit pas, d'autres qu'il y a un petit quelque chose.
Bon, maintenant il paraît que je dois passer la main à cinq autres blogueurs. Comme je ne m'y résous pas je laisse cela aux volontaires, qui seront bien sûr lus avec plaisir et grande attention.
18:15 | Lien permanent | Commentaires (5)
Le jour où je suis mort
On m’a affecté à la défense du centre ville. Pourquoi pas ? Je ne suis qu’à 500 mètres de chez moi et cela me permet d’y aller de temps à autre pour voir si mon immeuble tient toujours debout et si personne aurait eu l’idée de "visiter" mon appartement. Avec deux compagnons je campe depuis une quinzaine de jours dans un ancien snack-bar près de ce qui est censé être la ligne de front. C’est ma première affectation.
Quand on est venu me chercher, une vingtaine de jours après le début des Événements, je me suis laissé faire. Avais-je le choix de toute façon ? Et puis sans eau ni électricité le temps commençait à me paraître long, je crois aussi que je déprimais un peu. Trois mois après, dont un dans un camp d’entraînement à la campagne avec maniement d’armes légères, marches, manoeuvres, rudiments de tactiques militaires et propagande (déjà !) et deux dans un hôpital militaire pour une entorse mal soignée faite lors d’un exercice, j’ai insisté, au moment de choisir mon unité, pour intégrer celle des Royalistes. Au yeux des autres nationalistes, ils faisaient figure d’originaux, leur dénomination officielle n’était-elle pas "La Grande Armée Catholique et Royale" en souvenir de la Guerre de Vendée ? Mais c’était sans importance puisqu’on avait besoin de tout le monde et qu’ils se battaient sans rechigner.
Les deux combattants qui tiennent la position avec moi (c’est pour l’instant plutôt facile puisqu’on ne nous a pas encore attaqué) sont très fréquentables. Éric, un ancien gendarme, est le plus vieux, il a le grade de sergent et commande. L’autre, Jean-Baptiste dit Jeb, plus jeune que moi, est étudiant en Histoire. Sur le bras gauche de nos vestes sont cousus un drapeau tricolore et un Sacré Cœur. On dispose d’un poste émetteur-récepteur, de quelques semaines de vivres, de nos fusils d’assaut et d’une petite réserve de munitions, pas de quoi tenir un siège. Voilà c’est à peu près tout.
Et puis on attend, si on voit quelque chose de suspect on transmet au Quartier Général. Le problème c’est que tout parait suspect et que rien ne l’est vraiment. Pour l’instant on ne voit que des civils (nous ne le sommes déjà plus ?!) passaient sur l’avenue qui sert de ligne de démarcation. Tant qu’ils n’ont pas de comportements hostiles on ne fait rien. Ils ont seulement l’air inquiet et cherchent de quoi continuer à vivre à peu près normalement avec leur famille. Parfois, ils viennent nous voir et nous demandent si on sait quelque chose sur ce qui se passe. On a ordre de ne rien dire et on s’y tient d’autant plus facilement qu’on n’en sait pas plus qu’eux. Mais on prend des airs mystérieux et on lâche des « désolé, pas le droit de dire quoi que se soit .»
Au départ, quand un civil s’approchait, on faisait scrupuleusement les sommations d’usage. Trois jours après, une fouille rapide suffit. C’est incroyable comme la routine (et son relâchement inhérent) s’installe vite. Mes compagnons, notre "poste de garde" (le Poste avancé n° 17), la portion d’avenue que l’on distingue derrière l’empilement hétéroclite qui obstrue les ouvertures constituent notre univers. Avec l’habitude il est devenu rassurant et je crois que cela nous aurait coûté de le quitter pour aller ailleurs.
Pour l’instant, le conflit se limite pour nous à des tirs sporadiques, à quelques rares explosions à grande distance de notre position et à une rafale contre notre façade (sans qu’on puisse réagir d’ailleurs, les "attaquants" étant à moto). On entend, mais on ne voit rien. L’avenue est d’autant plus calme qu’elle est interdite aux véhicules par des barrages constitués de containers aux deux extrémités. Nos patrouilles quotidiennes dans notre secteur (on ne franchit pas l’avenue) ne nous apprennent rien d’autre.
Confusément, on espère que les choses changent pour sortir de ce quotidien amollissant, entre nous on se dit même espérer une attaque pour nous défouler, tout en s'avouant que l’on n’est pas si mal et que les choses ne peuvent que se modifier en pire. Avec de la chance peut-être la « guerre » (on a un peu de mal à l’appeler ainsi, comme si cette dénomination aggrave la situation) finirait sans qu’il y ai trop de casse.
- Nous sommes le 15 août, dit Jeb comme pour lui-même, tout en griffonnant sur le carnet qu’il appelle très sérieusement son Journal de guerre.
Éric et lui sont croyants, puisque je ne le suis pas, au départ ils s’étaient demandés pourquoi j’avais choisi d’intégrer la G.A.C.R. Je n’avais pas répondu à leurs interrogations et ils n’avaient pas insisté, mais je pense qu’ils se posent toujours la question. Peut-être qu’en me mentionnant le jour Jeb espère-t-il me voir prier avec eux. Peine perdue.
Éric ne dit rien, il semble inquiet et scrute l’avenue. Hier, les tirs s’étaient rapprochés et intensifiés. Interrogé, le QG avait parlé d’une offensive ennemie mais nous avait assuré qu’elle ne concernait pas notre secteur et qu’elle ne tarderait pas à être endiguée comme les précédentes. Pourtant tout est étrangement calme depuis ce matin. On n’entend que le chants des oiseaux, aucun civil ne s’est montrés depuis le levé du jour.
- Viens voir. Je crois qu’il se passe quelque chose.
Je m’approche d’Éric. Et regarde dans la même direction que lui. Je ne vois rien.
- Si, regarde au-dessus de la boulangerie. La deuxième fenêtre en partant de la droite.
- Merde ! T’as raison, il y a un mec avec une arme. C’est peut-être un des nôtres ?
- De l’autre coté de la ligne, sans qu’on soit prévenu, c’est impossible. Jeb, préviens le QG.
Jeb s’arrache à l’écriture de son journal et s’exécute.
- Ils nous disent de riposter seulement si on nous tire dessus et de les tenir au courant.
- Rien d’autre ? demande Éric.
- Non.
- Merci pour tout, ironisé-je.
Maintenant on est trois à regarder dehors. On scrute à s’en faire mal au yeux et à la longue tout semble se mettre à bouger, tout devient hostile. Et puis soudain on aperçoit des gens armés qui passent d’un bâtiment à l’autre courbés en deux. Jeb transmet à nouveau, mais on doit attendre : "pas de provocation". Mince, moi qui croyait être en guerre ! Alors, on attend. On a tous vérifié notre arme. Éric et moi près des minces ouvertures qui donnent sur l’avenue et Jeb au poste radio. Et puis c’est un bruit qui enfle, un grondement qui se rapproche faisant vibrer le bâtiment. Je regarde Éric. Il est blême et murmure entre les dents :
- Merde, je crois bien qu’on nous envoie les chars.
- Mais on a pas d’arme contre ça, dis-je stupidement.
- Jeb ! dis-leur qu’on a des chars en face.
Jusque là l’Armée française avait officiellement gardé une certaine neutralité en ne fournissant aucune arme lourde aux belligérants, il fallait se rendre à l’évidence : les choses avaient changé.
- Je capte rien, dit Jeb d’une voix blanche.
- Essaie encore. Si on a encore rien, on se replie.
Le char vient d’apparaître dans mon champ de vision, sur ses flancs et sa tourelle il y a des choses inscrites à la peinture verte, mais je n’arrive pas déchiffrer à cette distante. Il s’arrête et son canon pivote vers nous.
- Foutons le camp !
Je crois que c’est moi qui a crié, et puis tout s’écroule autour de nous. Je suis sur le sol, je n’entends plus rien, j’essaie de me relever, mais ma jambe gauche se dérobe, j’ai du sang partout. Je tousse, la poussière me rentre dans la bouche, dans les poumons. Où sont Éric et Jeb ? Tout est sans dessus dessous et j’ai l’impression que le plafond est plus bas, comme si le bâtiment s’était affaissé.
On me prend par les aisselles et on me tire dehors par la porte de derrière. Dans la rue, Jeb, c’est lui qui m’a sorti de là, passe mon bras au-dessus de ses épaules et m’aide à me mettre debout. Il est couvert de poussière, mais ne semble pas en trop mauvais état. Les sons me parviennent déformés, lointains et ma jambe refuse toujours d’obéir, par contre je ne souffre pas, pas encore. Par les petites rues on arrive à s’éloigner tant bien que mal de notre poste. Personne n’a l’air de nous poursuivre.
Jeb est exténué. Il m’aide à m’asseoir, adossé à un mur.
- Je vais chercher de l’aide.
Il doit voir la panique dans mes yeux, car il rajoute aussitôt :
- Je reviens, fais-moi confiance. Je reviens.
Il s’éloigne et avant de tourner dans la rue voisine me fait un signe de la main. Je n’ai pas la force de lui répondre. Je n’arrive pas à parler, mais j’entends de mieux en mieux et je crois comprendre que le char ou les chars font des cartons sans interruptions. Je me demande bien sur quoi d’ailleurs.
Je regarde pour la première fois ma jambe, ce n’est pas beau, il me manque un morceau de cuisse et j’ai perdu beaucoup de sang. Pourtant, je me sens étrangement léger. Les détonations semblent se rapprocher. Peut-être que des renforts amis sont arrivés. Je n’en sais rien, j’attends Jeb. Le plus infime mouvement me coûte. Et il y a ce bruit métallique qui me réveille, je m’étais endormi. C’est sur ma droite. Malgré la nausée, je fais un effort pour voir ce que c’est. Je la vois à un mètre de moi, dégoupillée.
18:10 | Lien permanent | Commentaires (6)
Le tour de France des monuments (choix absolument arbitraire) : Le Vésinet (78)
18:09 | Lien permanent | Commentaires (0)