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26/05/2025

Pépiements (360)

Le goût de la conformité vertueuse, la haine et la peur panique de l’histoire, sinon comme caricature univoque et fléchée, ont atteint un point tel qu’à côté de ce qu’est aujourd’hui un citoyenniste, avec ses indignations calibrées et labellisées, son hypocrisie de curé, sa lâcheté devant tout conflit direct, n’importe quel intellectuel de gauche des années cinquante ou soixante passerait presque pour un farouche libertaire débordant de combativité, de fantaisie et d’humour. À observer une telle normalisation des esprits, on en arriverait à croire à l’action d’une police de la pensée. En fait l’adhésion au consensus est le produit spontané du sentiment d’impuissance, de l’anxiété qu’il entraîne, et du besoin de rechercher la protection de la collectivité organisée par un surcroît d’abandon à la société totale. La mise en doute de n’importe laquelle des certitudes démocratiquement validées par l’assentiment général – les bienfaits de la culture par Internet ou ceux de la médecine de pointe – pourrait laisser soupçonner une déviation par rapport à la ligne de l’orthodoxie admise, peut-être même une pensée indépendante, voire un jugement portant sur la totalité de la vie aliénée. Et qui est-on pour se le permettre ? Tout cela n’est pas sans rappeler d’assez près la maxime de la soumission militante, perinde ac cadaver, ainsi que l’avait formulée Trotski : « Le Parti a toujours raison. » Mais alors que dans les sociétés bureaucratiques totalitaires la contrainte était ressentie comme telle par les masses, et que c’était un redoutable privilège des militants et des apparatchiks de devoir croire à la fiction d’un choix possible – pour ou contre la patrie socialiste, la classe ouvrière, le Parti –, c’est-à-dire d’avoir à mettre constamment à l’épreuve une orthodoxie jamais assurée, ce privilège est maintenant démocratisé, quoique avec moins d’intensité dramatique : pas question de s’opposer au bien de la société, ou à ce qu’elle y déclare nécessaire. C’est un devoir civique que d’être en bonne santé, culturellement à jour, connecté, etc. Les impératifs écologiques sont l’ultime argument sans réplique. Qui ne s’opposerait à la pédophilie, certes, mais surtout qui s’opposerait au maintien de l’organisation sociale qui permettra de sauver l’humanité, la planète et la biosphère ? Il y a là comme une aubaine pour un caractère « citoyen » déjà assez bien trempé et répandu.

Catastrophisme, administration du désastre et soumission durable (2008)

René Riesel et Jaime Semprun

(Merci à br)

 

Commentaires

@Pharamond : Las, je m'était arrêté à l'article premier et dernier de toute dictature : "La Phynance a toujours raison." ;-)

Écrit par : br | 26/05/2025

br > J'ai trouvé que les quelques lignes qui suivaient étaient intéressantes.

Écrit par : Pharamond | 26/05/2025

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