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22/08/2017

Long est le chemin...

Au mois d'avril Polydamas a fait paraître un billet pour présenter ce qui pourrait être un manifeste de la réacosphère publié sur le blog aujourd'hui disparu de Hank :

Qui nous sommes, ce que nous faisons et pourquoi nous le faisons.

14 mars 2009, par Hank.

 

Nous ne sommes ni des héros, ni des rebelles. Nous ne sommes ni des guerriers, ni des conquérants. Pour la plupart, nous n’imaginons même pas pouvoir tuer pour nous défendre. Pour la plupart, nous nous contentons de nous arrêter au bord du chemin pour mieux observer le troupeau qui défile. Nous ne prétendons incarner aucun idéal de perfection. Nous ne donnons pas de leçons.

Nous sommes païens, chrétiens, athées ou agnostiques, mais ce qui nous unit au-delà de nos – nombreux – points de divergence, c’est la conscience aigüe que notre peuple est programmé pour la disparition.

Nous ne sommes ni prosémites, ni antisémites. Ni pro-arabes, ni anti-arabes. Ni pro-chinois, ni anti-chinois. Ni pro-indiens, ni anti-indiens. Ni pro-africains, ni anti-africains. Nous connaissons et admirons, quand c’est légitime, les œuvres des uns ou des autres. Nous ne sommes ni racistes, ni antiracistes.

Nous ne reprochons à aucun peuple de vouloir s’imposer, à aucune culture de souhaiter s’étendre. Nous ne dénions à aucun peuple le droit, sinon le devoir, de prospérer et de bâtir sa légende par le sabre ou le livre.

En revanche, nous reprochons à notre propre peuple d’avoir renoncé à sa propre survie.

Nous croyons à l’histoire et au long terme. Nous croyons aux civilisations qui naissent, aux civilisations qui brillent, aux civilisations qui chutent. Nous savons que les vainqueurs d’hier peuvent être les vaincus de demain. Et inversement.

Nous ne croyons pas nécessairement à la supériorité intrinsèque de notre culture, mais réclamons le droit d’y croire, à l’instar de tous ces Autres qui portent des cultures auxquelles, par leur foi, leur vigueur, leur labeur ou leur détermination, ils insufflent la vie.

Nous réclamons à notre époque, à nos parents, à nos contemporains, que soit reconnue notre volonté de rentrer dans l’histoire, en tant que membres d’un peuple distinct, porteurs d’une culture distincte née de racines distinctes.

Et nous disons que si cette volonté n’est pas reconnue, que si le message dont nous sommes porteurs ne trouve pas d’écho dans la masse de nos semblables, alors nous disparaîtrons tous.

Nous serons rayés de la surface du globe, et tout ce qui fait ce que nous sommes sera piétiné, détruit ou jeté aux oubliettes. Nos statues seront défigurées, nos monuments rasés, nos livres brûlés ; le temps effacera jusqu’à notre souvenir, car d’autres auront rebâti et prospéré sur les ruines de nos temples, de nos maisons et de nos bibliothèques.

Et si d’aventure il se trouve un historien pour prendre notre défense ou se passionner pour les œuvres de nos anciens, il se trouvera aussitôt un million, un milliard d’âmes pour lui rappeler que nous étions les méchants, et que nous avons mérité la mort.

Car c’est ainsi que les autres nous voient. Et c’est ainsi que la soldatesque du système nous présente à nous-mêmes et présente nos ancêtres aux jeunes générations. Comme les méchants coupables de tous les crimes de l’histoire. Colons, esclavagistes, génocidaires, collabos, fascistes, racistes, la liste est longue ; voilà ce que nous sommes. Voilà tout ce que nous sommes, prétend le système.

Mais nous ne marchons plus dans la combine. Nous refusons ce portrait factice et partisan, pour plusieurs raisons.

D’abord, parce que nous ne voulons pas mourir.

Ensuite, parce que nous savons qu’aucune grande civilisation n’est vierge de massacres, de pillages, d’injustices et de brutalités diverses. Parce que nous savons, nous qui croyons à l’histoire, que nous n’avons pas le monopole du colonialisme et de l’esclavagisme, et que ceux-là mêmes qui nous donnent des leçons n’ont que rarement le courage de jeter un regard critique sur les charniers qui émaillent leur propre passé.

Finalement, parce que nous savons que nous ne sommes pas seulement la peine et l’asservissement. Nous sommes aussi la grande philosophie. Nous sommes la grande littérature. Nous sommes des explorateurs, des navigateurs, des scientifiques, des artistes. Nous sommes d’immenses généraux. Nous sommes une foultitude de paysages, d’hommes, de femmes et de pensées multiples qui sont autant de versants de la liberté. Nous sommes une histoire plurimillénaire riche et complexe qui prend ses bases dans l’Antiquité. Nous sommes tant de vastes choses que nul ne saura nous résumer en un livre, pas même en dix.
Aussi ne croirons-nous plus ceux qui prétendent dresser un portrait accablant de notre peuple en cent cinquante pages à peine.

Et c’est pourquoi, humblement, nous écrivons ce que nous écrivons. Pas par plaisir. Pas par égotisme, mais parce que nous sentons que cela doit être fait. Ce n’est pas une mission divine, ce n’est pas une gageure, c’est simplement ce que nous faisons dans l’espoir qu’un jour, nous n’ayons plus à le faire.

Quand nous écrivons, par exemple, que les peuples occidentaux sont appelés à disparaitre, remplacés peu à peu par des peuples plus prolifiques, plus vivants et plus humains, cela ne nous procure aucun plaisir, car nous ne mettons aucune idéologie derrière ce froid constat. La conviction que nos rares descendants, puisque nous n’assurons plus notre renouvellement par les naissances, seront soumis au bon vouloir de ces futurs maîtres que nous appelons aujourd’hui minorités visibles ne nous fait pas sourire. Nous ne nous réjouissons pas à l’idée qu’une probable guerre couchera côte à côte dans la glaise et le sang nos fils et les leurs.

Mais puisque nous souhaitons rentrer dans l’histoire, nous savons au fond de nous que cela ne se fera pas sans sacrifices. Nous en sommes effrayés, bien entendu ; ils mentent ceux qui prétendent qu’ils sont prêts à monter à l’assaut dès demain. Et puis, à l’assaut de quoi ? Nul ne saurait le dire avec précision. C’est bien pour ça qu’il est si facile de se prendre pour un combattant sur internet : ça n’engage à rien.

Il n’est pas à exclure, cependant, que le courage naisse au fond des estomacs les plus incertains ; face au choix entre la soumission et le combat, l’instinct de survie nous poussera peut-être à des extrémités que nous n’imaginions pas jusqu’alors…

Long est le chemin, mais si nous l’arpentons, c’est pour ceux qui viendront après nous.

 

Commentaires

Grand, tout simplement.

Écrit par : le page | 22/08/2017

Voilà.

Écrit par : Carine | 22/08/2017

le page & Carine > Beau texte sensible, humble et honnête.

Écrit par : Pharamond | 22/08/2017

quasi-parfait !

Écrit par : corto | 22/08/2017

Je trouve aussi. Un texte comme j'aurais aimé savoir écrire.

Écrit par : Pharamond | 23/08/2017

"à l' assaut de quoi?" ... d' un ennemi protéiforme .. même sous nos propres couleurs .. on ne s' y trompera pas ;)

Très beau texte et merci à Hank , qui n' est de la famille Huley faut-il le préciser ?

Écrit par : EQUALIZER | 23/08/2017

Famille déjà fort trop nombreuse.

Écrit par : Pharamond | 23/08/2017

En voici un autre, de fier discours adapté à notre sinistre époque, celui du chef calédonien Calgacus qui harangue ses troupes en leur exposant sobrement le système amé^H^H^Hromain qui entend les asservir. Il a le talent de Tacite. *Mutatis mutandis*...

"Toutes les fois que je considère les causes de la guerre et l'extrémité à laquelle nous sommes réduits, un grand espoir m'anime ; oui, ce jour même et votre accord fonderont l'époque de la liberté de toute la Bretagne. Et en effet, tous nous fûmes exempts de la servitude ; au delà plus de terres ; la mer même ne serait pas un asile : la flotte romaine nous y menace. Ainsi le combat et les armes, seul parti honorable pour les braves, sont ici même le plus sûr pour les lâches. Les guerres précédentes, où l'on combattit contre les Romains avec une fortune diverse, avaient leur espoir et leur ressource en nous, nous les fils les plus nobles de la Bretagne, et qui, placés au fond même de son sanctuaire, et ne voyant pas les rivages de la servitude, avons eu nos yeux même préservés du contact de la tyrannie. Placés à l'extrémité du monde, derniers restes de sa liberté, cette retraite, qui nous cache à la renommée, nous avait jusqu'ici protégés : maintenant les dernières limites de la Bretagne sont à découvert ; ce qu'on ignore est ce qui en impose. Mais derrière nous plus de nation, rien, que des flots et des rochers ; et à l'intérieur sont les Romains, à l'orgueil desquels vainement vous penseriez échapper par l'obéissance et par la soumission : envahisseurs de l'univers, quand les terres manquent à leurs dévastations, ils fouillent même les mers ; avares, si l'ennemi est riche ; ambitieux, s'il est pauvre. Ni l'Orient ni l'Occident ne les ont rassasiés ; seuls, de tous les mortels, ils poursuivent d'une égale ardeur et les richesses et la misère : enlever, égorger, piller, c'est, dans leur faux langage, gouverner ; et, où ils ont fait un désert, ils disent qu'ils ont donné la paix.

La nature a voulu que les enfants et les parents fussent à chacun ce qu'il eût de plus cher : ils nous sont enlevés par des enrôlements, pour aller obéir en d'autres climats. Si nos épouses et nos soeurs échappent à la brutalité ennemie, les Romains les déshonorent sous le nom d'hôtes et d'amis. Nos biens, nos fortunes, sont absorbés par les tributs ; nos blés, par les réquisitions : nos corps mêmes et nos bras s'usent, sous les coups et les opprobres, à des travaux au milieu des bois et des marais. Les malheureux nés dans l'esclavage, une seule fois vendus, sont nourris par leurs maîtres : la Bretagne achète chaque jour sa propre servitude, chaque jour elle l'entretient. Et, comme dans une maison le plus nouveau des esclaves est le jouet même de ses camarades, ainsi, dans cet antique servage du monde, nouveaux et méprisés, nous sommes destinés à être victimes. Nous n'avons point, en effet, des champs, des mines, ou des ports aux travaux desquels on puisse nous réserver ; nous n'avons que du courage et de la fierté, vertus insupportables à des dominateurs ; et plus notre éloignement et le mystère de nos retraites nous protègent, plus nous sommes suspects. Ainsi, perdant tout espoir de pardon, enfin prenez courage, et vous à qui la vie, et vous à qui la gloire est la plus chère. Les Trinobantes, conduits par une femme, ont pu incendier la colonie des Romains, dévaster leur camp ; et, si leur prospérité ne les eût endormis, ils eussent secoué à jamais le joug. Nous, intacts et indomptés, nous qui n'avons point à conquérir une liberté, dès le premier choc ne montrerons-nous pas quels hommes la Calédonie s'était réservés ?

Croyez-vous aux Romains autant de courage dans la guerre que d'insolence dans la paix ? Ces hommes, qu'ont illustrés nos dissensions et nos discordes, tournent à la gloire de leur armée les fautes de leurs ennemis ; cet assemblage des nations les plus diverses, le succès le maintient, un revers le dissoudra. A moins que vous ne pensiez que ces Gaulois, ces Germains, et, j'ai honte de le dire, ces Bretons qui prêtent leur sang à une tyrannie étrangère, toutefois plus longtemps ennemis qu'esclaves, soient retenus par fidélité et par attachement ; c'est par la crainte et la terreur, faibles liens d'affection ; brisez-les : cessant de craindre, ils commenceront à haïr. Tout ce qui peut exciter à la victoire est pour nous ; nulle épouse n'enflamme le courage des Romains, nul père ne va leur reprocher leur fuite. Pour la plupart, point de patrie, ou ils servent une patrie qui n'est point la leur. Peu nombreux, tremblants, incertains, ne voyant autour d'eux qu'un ciel, une mer, des forêts inconnues, enfermés et comme enchaînés, ils nous sont livrés par les dieux. Qu'un vain appareil ne vous épouvante, ni cet éclat d'or et d'argent qui ne blesse ni ne défend. Dans les rangs mêmes de l'ennemi nous retrouverons les bras de nos frères ; les Bretons reconnaîtront leur cause ; les Gaulois se rappelleront leur ancienne liberté : ce qui leur reste de Germains les abandonnera, ainsi que naguère les Usipiens les ont délaissés, et dès lors plus de crainte. Des forts évacués, des colonies de vieillards, des municipes affaiblis et en proie aux discordes entre des maîtres injustes et des sujets prêts à la révolte. Ici est votre chef, ici est votre armée ; là, des tributs, les travaux des mines et tous les autres châtiments des esclaves : les rendre éternels, ou s'en venger aussitôt, va se décider sur ce champ même. Ainsi, en marchant au combat, pensez et à vos ancêtres et à vos descendants."

Toute ressemblance avec notre situation serait évidemment fortuite.

MM. Martin et Gaillard offrent une meilleure traduction (ce n'est pas si fréquent) dans leur remarquable *Anthologie de la littérature latine*.

Écrit par : Blumroch | 23/08/2017

Beau texte (même s'il est sans doute apocryphe), mais on sait que les Celtes perdirent tout de même la bataille. D'autres part, même si l'occupation romaine n'était pas de tout repos les barbares qui leur ont succédé ont ramené la Bretagne des siècles en arrière.

Écrit par : Pharamond | 23/08/2017

@Pharamond : Tacite a évidemment *traduit*, par empathie, ce que doit éprouver un chef digne de respect (belle performance pour un Romain, soit dit en passant). Comme l'écrivait Michaux dans *Poteaux d'angle* : "De la fierté, si le peuple en est capable" (citation de mémoire). L'issue du combat n'a, au fond, aucune importance (voir la prière de Conan, autre belle déclaration de guerre aux hommes et aux dieux). Poul Anderson avait écrit une fort jolie nouvelle sur ce thème.

Écrit par : Blumroch | 23/08/2017

P.S. : La nouvelle, de 1950, a pour titre *The helping hand* (en français, *La main tendue*, dans *Histoires de la fin des temps*). Anderson y montrait sa préférence résolue pour l'indépendance et pour la fierté, face à un vainqueur désireux d'imposer sa "civilisation" au vaincu. Evidemment, le vaincu doit n'avoir cédé qu'à la force des armes, et avoir une civilisation à opposer à son vainqueur.
Poul Anderson est un écrivain *très* talentueux, en plus d'avoir d'excellentes idées. N'était-il pas membre de la célèbre Society for Creative Anachronism ?

Écrit par : Blumroch | 23/08/2017

"L'issue du combat n'a, au fond, aucune importance", je préfère tout de même être vainqueur même si une "belle" résistance a son charme.

Je ne connaissais pas Anderson.

Écrit par : Pharamond | 23/08/2017

@Pharamond : Mourir à Alamo, c'est quand même une belle mort. ;-)
Cette instructive chronique m'avait échappé. Vous en donneriez, des idées... ;-)

Écrit par : Blumroch | 23/08/2017

Je ne dis pas le contraire, mais remporter la victoire et mourir dans son lit en pensant qu'on a mis les siens à l'abri c'est mieux.

Écrit par : Pharamond | 23/08/2017

ni prosémite ni anti sémite

ouais....

extra sémite depuis longtemps, je sens que ça va me faire considérer comme l'inverse de pro sémite

étonnant ,non?

Écrit par : kobus van cleef | 23/08/2017

@Pharamond : Les probabilités ne sont hélas pas en faveur de votre hypothèse. :-(

@kobus van cleef : Vrai que certains ne parviennent pas à comprendre ce point : l'histoire du monde n'est pas judéocentrique. Ce qui me rappelle cette plaisanterie (dont il existe de nombreuses variations), à moi narrée par une ancienne amie du peuple autoproclamé élu :

Après le crash de leur avion, plusieurs savants de diverses nationalités passent le temps en attendant les secours. Comme ils se sont écrasés dans la plaine africaine, ils décident de plancher chacun à leur tour sur l'éléphant, comme pour un oral de concours. L'Allemand choisit pour thème "L'éléphant et la philologie", l'Italien "L'éléphant et l'opéra", l'Anglais "L'éléphant et le commerce maritime", l'Américain "L'éléphant et la guerre d'indépendance", le Français "L'éléphant et l'amour", quand l'Israélien prend pour thème de sa causerie "L'éléphant et la question juive".

L'indifférence devient difficile à pratiquer, avec des fanatiques de tous les horizons. Quand on a compris que de l'être humain, on ne peut pas attendre grand-chose de bon, on ne perd pas son temps à faire de trop subtiles distinctions. ;-)

Écrit par : Blumroch | 23/08/2017

@Blumroch : de Poul Anderson j' avais adoré "la Patrouille du Temps" lu dans mon jeune âge ...
http://www.ebay.fr/itm/like/262781237755?chn=ps&dispItem=1

Écrit par : EQUALIZER | 23/08/2017

@EQUALIZER : Seule saga sur ce sujet à rivaliser avec celle de Fritz Leiber, Jr. Et comment oublier la série *Agent de l'Empire Terrien*, avec ce Dominic Flandry qui, sans la moindre illusion, cherche simplement à retarder l'arrivée de la Longue Nuit...

Écrit par : Blumroch | 24/08/2017

kobus van cleef > Difficile de se définir avec les mots inventés par le Système.

Blumroch > Je sais, mais il faut y tendre, l'autre cas de figure s'imposera peut-être de lui-même en cas d'échec.

Écrit par : Pharamond | 24/08/2017

Blumroch > Excellente l'histoire que vous racontez à kobus, je ne la connaissais pas.

Écrit par : Pharamond | 24/08/2017

@Pharamond : Je la croyais si connue que j'ai failli ne pas la rapporter, même si je la trouve d'une grande *vis comica*. ;-)

Écrit par : Blumroch | 24/08/2017

C'eut été dommage de ne pas la raconter.

Écrit par : Pharamond | 24/08/2017

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