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11/10/2011

J'ai la mémoire qui flanche...


La jurisprudence du procès de John Demjanjuk permettrait de rouvrir une centaine de dossiers.

La justice allemande pensait avoir tourné la page des grands procès pour les crimes du IIIe Reich. En réalité, la condamnation sans preuve directe, en mai dernier par un tribunal de Munich, de John Demjanjuk, 91 ans, pourrait entraîner une nouvelle vague de procès contre des participants à l'Holocauste.

Les autorités allemandes ont décidé de rouvrir les dossiers de plusieurs centaines de gardes dans des camps de concentration nazis, classés faute de preuves suffisantes. Le temps est désormais le principal ennemi pour les procureurs, qui cherchent à traduire en justice ces hommes âgés de 80 à 90 ans.

Traiter les dossiers «en un an»

«Nous ne voulons pas perdre de temps. Nous avons déjà rouvert les enquêtes, sans attendre les résultats de la procédure d'appel de Demjanjuk. Nous espérons pouvoir traiter tous les dossiers en un an», affirme Kurt Schrimm, directeur du Centre national d'enquêtes sur les crimes de guerre nazis à Ludwigsburg.

Les enquêteurs ont commencé par se replonger dans les dossiers de gardes dans les camps d'extermination nazis, puis sur ceux de membres des Einsatzgruppen, les escadrons mobiles d'extermination des SS. Grâce au cas de John Demjanjuk, les enquêteurs de Ludwigsburg, qui s'étaient aventurés en terrain inconnu, ont établi un précédent outre-Rhin. Déchu de sa nationalité américaine et expulsé des États-Unis vers l'Allemagne, Demjanjuk a été condamné, en mai, à cinq ans de prison pour complicité de meurtre dans l'extermination de 28 060 Juifs, en 1943, au camp de Sobibor en Pologne durant l'occupation nazie.

Pour la première fois lors d'un tel procès, les procureurs ont obtenu une condamnation sans fournir la preuve de la participation de l'accusé à un crime spécifique. L'accusation avait fondé son argumentation sur le fait que s'il travaillait dans un camp dont l'extermination était le seul but, sa fonction de garde le rendait automatiquement complice des meurtres commis pendant la durée de son séjour à Sobibor. «Aucune culpabilité individuelle, établissant que telle ou telle personne a été tuée tel jour, n'a été prouvée», se félicite Schrimm.

Déjà confondu avec Ivan le Terrible, un sinistre garde du camp de concentration de Treblinka, John Demjanjuk avait été condamné à la peine de mort en Israël en 1988. Avant que ses avocats ne démontrent en appel une confusion sur l'identité et que sa relaxe ne soit prononcée faute de preuves. Le parquet de Munich a ordonné sa remise en liberté, après deux ans de détention, en attendant son procès en appel en raison de son âge et de sa santé fragile. Seule la mort pourrait épargner un nouveau procès à Demjanjuk, d'origine ukrainienne mais apatride depuis qu'il a perdu sa nationalité américaine.

Le Centre Simon Wiesenthal a annoncé son intention de prêter main-forte à la justice allemande. «Dans deux mois, nous allons lancer une nouvelle campagne en vue de faire passer en jugement des criminels de guerre nazis», a indiqué Efraïm Zuroff, directeur du centre Wiesenthal de Jérusalem.

Aloïs Brunner en tête de liste

«Sur les centaines d'enquêtes rouvertes, il se peut qu'une vingtaine débouche sur des procès effectifs», estime Zuroff. Le célèbre chasseur de nazis souligne que «le temps qui passe est le meilleur allié des criminels de guerre nazis» toujours en vie, qui étaient pour la plupart des subalternes âgés d'une vingtaine d'années à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Selon Zuroff, Aloïs Brunner figure encore en première position sur la liste des dix principaux criminels de guerre recherchés par le Centre Simon Wiesenthal. «Probablement mort», il est responsable direct de la déportation de plus de 100 000 Juifs d'Autriche, de Grèce et de France vers les camps de la mort, et a trouvé refuge en Syrie après la guerre. Parmi les principaux responsables des crimes nazis, nombreux sont ceux à avoir échappé à la justice… jusqu'au jugement dernier.

 

Patrick Saint-Paul

Source : Le Figaro le 07/10/2011

Commentaires

«Aucune culpabilité individuelle, établissant que telle ou telle personne a été tuée tel jour, n'a été prouvée», se félicite Schrimm. Un précédent Schrimm aurait dit :
"... Si ce n'est toi, c'est donc ton frère,
... On me l'a dit : il faut que je me venge.
Là-dessus, au fond des forêts
Le Loup l'emporte, et puis le mange,
Sans autre forme de procès."

Ainsi, le loup de la fable montrait-il au moins la décence de ne pas prétendre faire un "procès". Nous n'en sommes plus à ces délicatesses.

Écrit par : L. Chéron | 12/10/2011

Vae victis. Au moins doit-on le dire clairement.

Écrit par : Pharamond | 12/10/2011

ça s'apparente un peu au fait de ranimer la flamme

Écrit par : Paul-Emic | 12/10/2011

Avec un maigre combustible...

Écrit par : Pharamond | 12/10/2011

Les commentaires sont fermés.