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05/02/2011

Note très suspecte

 Les Juifs (quand je dis Juifs il s'agit de ceux qui parlent en tant que tels et au nom de leur communauté) sont curieux. Il est entendu qu'entreprendre de les compter ou de les désigner est très mal interprété sous prétexte qu'ils souhaitent être considérés comme tout un chacun – et que la dernière fois que certains l'ont fait cela s'est mal terminé. Soit. L'intention paraît louable et justifiée, mais paradoxalement eux-mêmes n'hésitent pas à mettre leur judéité en avant en cas d'agression ou de ce qu'ils considèrent ainsi - et ils sont très susceptibles.

L'humour sur les Juifs, ils se le réservent mais se permettent d'en faire sur les autres communautés. Quand un Juif est attaqué on se doit de chercher s'il n'y a pas de l'antisémitisme là-dessous – et on finit très souvent par en trouver. On ne peut parler d'eux que favorablement. Ils leur arrivent aussi de faire prendre en compte leurs racines dans certains domaines autre que victimaires, sur le plan artistique notamment sans paraître imaginer que des caractères propres ne peuvent, logiquement, être que positifs.

Encore une fois il convient de revenir à la Seconde guerre mondiale : si quelqu'un y a tué des civils c'est un crime de guerre s'il y avait des juifs parmi eux c'est un crime contre l'humanité et peu importe de savoir si leur mort est issue d'un dramatique hasard ou d'une intention délibérée du fait de leur naissance, leur identité suffit. Partant de telles bases le débat est faussé et comme il est toujours impossible de se poser certaines questions sur ces faits pourtant anciens on continue a vivre sur ces fondations plus que douteuses qui entretiennent différentes formes d'antisémitisme et entraînent une aliénante autocensure chez les uns et une certaine paranoïa chez les autres. On en viendrait presque à se demander si cette situation viciée ne satisferait pas certains...

Commentaires

Vous dénoncez cette formidable déformation juridique analysée par maître Delcroix (Le théâtre de Satan) : avec l’antiracisme etc., ce n’est plus l’intention objective qui définit la culpabilité (l’accusé a-t-il oui ou non voulu commettre l’infraction), mais ses mobiles intimes, jugés plus ou moins peccamineux, selon la morale ambiante et relative ; il est en 2011 plus mal de tabasser sa victime parce qu’elle est d’une autre race, ou affiche telle « orientation sexuelle », que pour lui dérober son bien, ou même simplement pour le plaisir de cogner.
Ajoutons que la loi Pleven de 1972, avec « l’incitation à la haine » (mais uniquement « à raison » de race, ethnie ou religion), a aussi introduit un curieux délit « d’incitation » à l’adoption d’une simple position mentale, qui par définition ne saurait être elle-même une infraction. Haïr - surtout quand cette haine n’est même pas exprimée - n’est pas interdit, pas plus que détester, ou préférer, ou mépriser, etc, qui relèvent d’un for interne.

Écrit par : L. Chéron | 06/02/2011

Il est assez extraordinaire que peu de gens s'en étonnent malgré le grotesque et le néfaste de ces lois. L'effet de la désinformation depuis l'enfance sûrement, mais pas seulement. Je crois que trop de gens y trouvent encore leur intérêt.

Écrit par : Pharamond | 06/02/2011

Qui le premier a trouvé son intérêt dans ce conditionnement des esprits ? Je ne sais pas exactement, mais je viserais d’abord l’administration américaine de 1945, tout en sachant qu’elle ne devait pas plus alors que maintenant constituer un bloc homogène. Les avis devaient être partagés, mais pour le moment les « durs » l’emportaient. C’était le temps du plan Morgenthau, qui réservait à peu près à l’Allemagne le sort de la Pologne dans le système nazi. Ce délire a peu ou prou inspiré l’occupation US jusqu’à l’été 47 quand, sous Marshall et Clay, on a définitivement enterré une politique qui compliquait la tache de l’occupant et n’était plus guère de saison alors la Guerre Froide était venue : maintenir une population en état de « starvation » provoquerait une catastrophe sanitaire impossible à gérer et ferait le jeu de Staline (on pensait à la situation de 1918-19, voire de 1933). Au printemps 1945, on n’en était pas encore là, et le staff de Truman tenait à sa paix carthaginoise. Encore fallait-il la vendre à une opinion domestique qui sur son son sol n’avait subi de la guerre que des rigueurs assez bénignes, de plus volontiers moralisatrice et sensible au thème de la guerre injuste et inutile (on l’avait vu en 1919, on le reverrait au Viet Nam).
Revenons donc à mars-avril 45 : les armées de terre Alliées pénètrent en Allemagne (ce sont les « troupes au sol », comme disent les cuistres depuis le Kossovo-1999). Elles découvrent alors le grand massacre qu’a provoqué l’offensive aérienne stratégique sur le Reich. Les grandes agglomérations ont été vitrifiées au phosphore, et elle ne sont plus ravitaillées depuis de semaines. 600 000 civils allemands carbonisés dans les abris transformés en fours crématoires par les tempêtes de feu, pulvérisés par le « dicke luft » (l’effet de souffle) des explosions. Les réfugiés qui affluent de l’Est mangent les cadavres des chevaux. Le public américain, une fois les boys revenus, ne va-t-il pas considérer qu’on a quand même un peu attigé ? Et si le syndrome du pauvre allemand victime d’un vainqueur impitoyable, qui avait si bien fonctionné contre la France après 1918, se retournait contre les nouveaux vainqueurs hégémoniques ? Dans les camps de concentration de l’Ouest, surpeuplés de déportés évacués, et encore plus isolés que les villes, on ne brûlent et on n’enterre même plus les cadavres de typhiques ou d’affamés. Durant les semaines qui vont suivre, la mortalité restera anormalement élevée sous administration américaine (Dachau) ou britannique (Bergen-Belsen). Mais, dira-t-on, dans les camps, les victimes sont d’abord celles des nazis. Certes, mais la mortalité y a vraiment grimpé en flèche dans les derniers mois de la guerre, quand la logistique du Reich s’est effondrée sous les bombardements alliés.
La direction de la guerre psychologique américaine (« syke war ») a alors une idée de génie. Qu’est-ce que les Américains font de mieux ? Le cinéma. Avec le concours de Billy Wilder lui-même (on l’aperçoit sur un tournage à Buchenwald), une offensive audiovisuelle magistrale est lancée. Pour les gros plans, un (un) abat-jour en peau de chèvre, et deux (deux) tantzas caucasiens (sans doute faux) désignent le sadisme des nazis, précisément d’Ilse Koch, la « chienne de Buchenwald ». Pour les plans larges, les fosses communes où s’amoncellent les cadavres émaciés : les nazis ont « exterminé » les déportés. Sciemment et délibérément. Reconnaissons-le, la plus belle de ces images est britannique : à Bergen-Belsen, un bulldozer pousse, comme dans une décharge, les corps nus emmêlés. Une habile coupure sur les plans fixes tirés en photos dissimule le béret du conducteur anglais. Maint spectateur de cette image mondialement connue croira même avoir vu les bourreaux nazis à l’oeuvre.
La sidération mentale joue encore. L’Allemagne avait commis le crime insurpassable. Plus attentif et plus prudent que Galilée, je précise que le lien logique unissant les deux paragraphes précédents n’est qu’un hypothèse.

Écrit par : L. Chéron | 08/02/2011

Je suis évidemment d'accord avec vous et je me permets de vous indiquer deux notes que j'ai écrites sur le sujet et qui peuvent vous intéresser :

http://guerrecivileetyaourtallege3.hautetfort.com/archive/2007/05/28/la-guerre-continue.html#more

http://guerrecivileetyaourtallege3.hautetfort.com/archive/2009/07/17/comment-les-cornes-ont-pousse-sur-le-crane-d-hitler-et-devin.html#more

Écrit par : Pharamond | 08/02/2011

Je relis vos deux communications, ainsi que leurs commentaires, et j'en partage l'opinion. L'obsession antinazie, cette espèce d' « antinazisme primaire » (catégorie jamais identifiée donc jamais dénoncée, à l'inverse de l' « anticommunime primaire »), qui se perpétue encore, alors que bientôt les derniers contemporains auront tous disparu, a quelque chose d’anormal.
Ça n’est même pas à cet aspect consécutif que mon commentaire était consacré, mais à l’inflexion de l’histoire déjà dépourvue d’évidence logique qui vit dès 1945 une diabolisation explosive de l’ennemi, au moment même où il venait de devenir totalement inoffensif. Mais voilà : le vainqueur découvre alors qu’il a quelque responsabilité dans le grand massacre survenu sur les territoires du Reich finissant. Alors, avec un excellent réflexe tactique, il s’empresse de réagir par un bombardement médiatique massif : le monstre, c’est la bête abattue, et rien qu’elle. On a connu - mais en beaucoup moins réussi - la même tentative en 1991, avec les monstruosités saddamites, dont les nouveaux nés arrachés des couveuses koweitiennes, médiocre réédition des fillettes belges aux mains coupées de 1914. La révélation de l’imposture, il est vrai, n’a pas fait déguerpir la « coalition » de Mésopotamie. La grande politique connaît, comme la thermodynamique, la loi d’irréversibilité.

Écrit par : L. Chéron | 09/02/2011

Personnellement je trouve plus extraordinaire la pérénité de la diabolisation que sa création dans l'immédiate après guerre, toute monstrueuse que cette diabolisation puisse être. N'oublions pas que c'est la première guerre totale de l'histoire moderne : à guerre totale propagande totale. La bizarrerie est à mon avis que cette propagande au lieu de s'amenuiser avec les années enfle au contraire et c'est unique dans l'histoire.

Écrit par : Pharamond | 09/02/2011

Tiens, Gaëlle a sauté ?

Écrit par : tania | 10/02/2011

?

Écrit par : Pharamond | 10/02/2011

Me suis trompée !
Mille excuses.

Écrit par : tania | 10/02/2011

Oui, c'est unique dans l'histoire. Pour se limiter à la France et être précis, notons que jusque vers 1970, la mémoire de 39-45 a connu une évolution normale, conforme à la règle de l'apaisement progressif. On peut dater le renversement de l'éclatement de l'affaire Touvier en 1971. Il faut évidemment rattacher ce fait précis à d'autres éléments du contexte : l'héritage complexe de mai 68, où se mêlent une volonté de revanche d'un gauchisme très judaïsé et la mort du mythe gaulliste de la France résistante ; plus tardivement la bombe révisionniste qui éclate en 1979 avec Faurisson, puis encore le surinvestissement dans la « Mémoire » d’une classe politique déboussolée par la question identitaire à partir des années Le Pen. Une transition générationnelle joue enfin : avec Mitterrand, disparaissent les classes qui avait vécu les événements, et la relève ne sait plus fonctionner que par schémas manichéens (qu’on se rappelle El Kabbach médusé quand Mitterrand lui avait lancé ne pas se souvenir d’avoir remarqué le Statut des Juifs à l’époque de sa promulgation, ce qui est hautement probable).

Écrit par : L. Chéron | 11/02/2011

... "qui avaient vécu". Mea culpa.

Écrit par : L. Chéron | 11/02/2011

tania => Il n'y pas de mal.

L. Chéron =>Reste à trouver à qui profite le crime en évitant de se retrouver au tribunal.

Écrit par : Pharamond | 11/02/2011

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