23/07/2007
Hébétés
La morale contemporaine est réactive et non réfléchie. Et c’est bien en quoi elle est encore une morale, quoiqu’en disent les traditionalistes et les penseurs du déclin : car l’amoralisme se constitue sur l’incapacité de distinguer le bien du mal. Cependant, la différence avec l’ancienne morale est abyssale. Le jugement moral réfléchi établit un rapport entre une situation et des références. Il compare, pèse et doute. Pour lui, chaque situation vient prendre place sur une échelle, se compare à un modèle qui lui préexiste. Le jugement morale est tout ce qui reste - ce n’est pourtant pas rien - en défaillance des échelles et des modèles. Il récuse le mal instinctivement, comme par éblouissement. Sa seule échelle est l’émotion. Le jugement réfléchi se pose sans cesse la question de la reconnaissance, du repérage du mal qui saurait se cacher sous le bien, car l’émotion ne lui suffit pas, voire lui semble trompeuse. L’ancienne morale opérait sans cesse un retour sur soi, faisant appel à la mémoire des référents. Tandis que le jugement réactifs se passe de tels débats intérieurs, qui n’ont plus lieu d’être. Il s’exerce par fascination ou aveuglement du mal et du bien, et ici l’aveuglement prend le double sens de l’éclair qui à la fois impose et éblouit.
Chantal Delsol
Le souci contemporain
22:38 | Lien permanent | Commentaires (10)
Commentaires
Me pousser comme ça à l'ascension de la montagne des intelligences qui jugent et analysent l'événement sportif franchouillard par excellence, c'est un peu m'obliger à me promener en cycliste moulant dans un centre commercial de banlieue, c'est pitoyable. Mais je me lance dans l'exercice comme d'autres s'essaient à des nouvelles positions avec leurs partenaires : c'est excitant au départ, chiant ensuite, et finalement ridicule.
En ce moment, j'ai un lieu de travail que je me dois de fréquenter assidûment si je souhaite gagner le salaire qui va avec. Un salaire qui ne fait que combler la succession de prélèvements auxquels je dois faire face, comme nombre de français appartenant aux couches populaires (revenus en dessous de 1250 net mensuel). Et comme tout crétin qui bosse, je dois aussi supporter les collègues, généralement des français d'origine populaire qui n'ont utilisé l'enseignement dispensé à l'école que pour gérer, calculer, acquérir, posséder, s'acheter, se vendre... Avec ceux-ci, quand je ne peux pas faire autrement, je dois parler de choses et d'autres pour faire passer ce putain de temps lourd des jours de besogne.
http://andy-verol.blogg.org
Écrit par : Andy Verol | 23/07/2007
Euh... bon courage, alors.
Écrit par : Pharamond | 24/07/2007
La morale moderne est basée sur un relativisme "absolu" alors que la morale traditionnelle reposait sur la loi naturelle, les commandements de Dieu, les coutumes voire les bons usages autant dire quelque chose de quasi intangible alors que le relativisme permet "l'élasticité "morale la plus totale quand ce n'est pas carrément l'inversion totale des valeurs. Excellent texte.
Écrit par : CCRIDER | 24/07/2007
Très bien vu.
Nous sommes visiblement rentrés dans une ère où l'émotion l'emporte sur une raison disqualifiée à force d'être malmenée par les charlatans de l'intelligence autoproclamée
Écrit par : C. | 30/07/2007
Si je pense à propos de la Morale, je suis car je pense. Je suis, je deviens un "charlatan de l'intelligence autoproclamée".
En quoi le Mal, cet autre facette du Bien - peuvent-ils exister sans et hors de l'Autre - serait sublimé pour ne laisser paraître que le Bien ?
En quoi mon Esprit vivrait d'émotions nouvelles, d'un jaillissement ininterrompu, sans modèle, sans référent ?
Serais je Libre, libéré, au point de ne vivre que le Bien, le Bonheur et le Beau ?
Si la nouvelle Morale est ce fleuve d'émotions, qu'en penser dans un fleuves d'images où la Vérité se cache, est cachée - Ah ce cimetière de Timisoara - ?
Fluctuante, certes, mais la Morale, sortie de ses concepts religieux - est-ce vrai? - retrouve son chemin.
A-t-elle été autrement ? De l'Inquisition à nos jours, et bien avant, n'a-t-elle fait rien d'autre que fluctuer, pour revenir comme un besoin imprescriptible d'édicter un modèle sans cesse dépassable et dépassé, d'une manière de vivre et s'accepter pour être ensemble ?
La Morale d'aujourd'hui n'est-ce pas aussi une absence de Morale ? N'est-ce pas une facette réactive et non réfléchie d'un besoin d'une Morale Autre que celle qui nous veut imposer de ne plus réfléchir ?
Quand j'écris je pense, et j'en suis désolé, je suis devenu un "charlatan". Pourtant, j'aime beaucoup ce qui s'écrit !
Bien amicalement
Écrit par : christian | 30/07/2007
CCRIDER : J'ai découvert C. delsol il y 2 ou 3 ans, et je ne suis pas déçu.
Christian : Que d'interrogations ! Et que de réponses implicites inhérentes... Je relirai ton commentaire
(Au fait, as-tu passé de bonnes vacances ?)
Écrit par : Pharamond | 30/07/2007
Les vacances seront dans deux semaines et quesques jours ... au soleil du grand sud ... enfin
Pharamond : Ce ne sont pas des réponses implicites forcément, peut-être seulement une manière de poser des questions et d'induire des pistes de réflexion à partir du texte de C. Delsol, sans vouloir fermer aucune trace possible.
Écrit par : Christian | 30/07/2007
J'ai relu. Cela méritrai une note séparée pour chaque interrogation.
Oups, j'ai cru que ton absence était un départ en vacances.
Écrit par : Pharamond | 30/07/2007
Oui, merci, j'ai passé de bonnes vacances l'ami. Les propos et interrogations de "Christian" (fort intéressants) ne sont pas les miens. Amitiés.
Écrit par : C. | 30/07/2007
C. : Je me suis un peu emmêlé les pinceaux :-(
Donc ; heureux que tu ais passé de bonnes vacances.
Christian : Toutes mes excuses pour la méprise entre C. et toi. Donc ; bonnes vacances par anticipation.
Écrit par : Pharamond | 30/07/2007
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